mardi 30 juin 2020

TRACY HIGHTOP (Guitariste de Jane Lee Hooker) // Interview // Champagne And Reefer... Juillet 2020.


Aujourd’hui, c'est avec un immense plaisir que nous vous faisons partager une interview très rock'n'roll, avec une guitariste fan de rock, fan de blues, fan de musique, Tracy Hightop des JANE LEE HOOKER. En attendant leur prochain album qui ne devrait pas tarder, et en espérant les revoir bientôt chez nous en France...


Quel a été ton parcours avant de devenir Guitariste avec Jane Lee Hooker ? Comment as-tu découvert la musique ?
Tracy Hightop: J'avais environ 4/5 ans quand j'ai vu une émission de télévision américaine intitulée "The Partridge Family" et je suis devenu obsédée par le fait de jouer dans un groupe.
Mes parents - qui étaient très sympas - m'ont acheté une batterie Ludwig d'occasion lors d'une vente aux enchères.
Et c'est comme ça que tout a commencé. Je jouais constamment de la batterie.
Vers l'âge de 9 ans, mes parents m'ont acheté ma première guitare acoustique, probablement dans l'espoir que je me tourne vers un instrument moins bruyant.
Mais je n'ai jamais vraiment aimé la guitare acoustique et ce n'est que vers 13 ans qu'une fois de plus, ma mère m'a acheté une guitare électrique et un ampli d'occasion dans un vide-grenier.
La guitare était une épave et mes mains étaient petites,  il m’a fallu énormément d'efforts pour réussir à en jouer.
Au lycée, j’ai beaucoup écouté du rock sudiste et Muddy Waters.
Je jouais les solos sur les albums de Muddy Waters.
J'avais un grand ami à JHS (lycée), qui savait jouer tous les solos de rock sudiste, et il m'a vraiment inspiré (Jay Koppelman).
Mais je continuais la batterie, et je ne prenais ma guitare que lorsque mes parents rentraient du travail. Quand je suis allée à l'université, j’ai repris ma guitare car je ne pouvais pas apporter ma batterie, et là-bas j'ai rencontré un guitariste incroyable, Alain Whitman, qui avait sa chambre au même étage que moi.
Il m'a beaucoup appris sur la manière de jouer les solos et m’a donné un livre, "The Heavy Guitar Bible" que j'ai encore à ce jour.

Raconte-nous les premiers groupes dans lesquels tu as joué ?
Tracy Hightop: Le premier groupe dans lequel j'ai joué dans un club était un groupe hardcore de Long Island appelé "The Violent Gas Attendants".
C'était un groupe génial et je suis tombée amoureuse de ces rythmes de batterie déchainés.
J'étais la seule fille du groupe et nous étions influencés par d'autres groupes hardcore de New-York comme les Crumbsuckers, les Six and Violence et Agnostic Front.
J'avais 18 ou 19 ans.

Comment as-tu rencontré les autres membres de Jane Lee Hooker, comment s'est passée la formation du groupe ?
Tracy Hightop:  J'ai rencontré Mary dans The Wives (batterie) et nous avons voyagé ensemble dans tous les États-Unis avec beaucoup de plaisir pendant de nombreuses années.
En 1997, j'ai joué de la batterie pour un groupe punk entièrement féminin appelé Spermicide, et Tbone était la guitariste.
J'ai réalisé que Tbone était capable de jouer des pistes de rock et de blues classiques incroyables, et avec notre ami Nelsha, nous avons formé HELLDORADO qui était le premier groupe dans lequel je jouais de la guitare pour de vrai.
J'ai rencontré Ron en tournée avec The Wives et je l'ai vu jouer de la batterie avec New Republic vers 1993/1994 ? Il m'a époustouflée et nous sommes devenus des amis très proches.
Ron et moi avons joué dans un groupe de reprises de Plasmatics et nous avons été invités par les Plasmatics originaux à jouer au mémorial de Wendy O. Williams au CBGB’s.
Ça a été un moment très fort pour moi. J'ai tout fait pour recruter Ron comme batteur pour Helldorado et il a fait notre première démo avec nous.
Finalement, je ne pouvais pas le voler à son groupe, et Snuka et Helldorado ne se sont jamais remis de son départ.
Il est sans conteste mon batteur préféré que je connais personnellement (je ne connais pas personnellement Stewart Copeland) et après tant d'années, nous jouons enfin ensemble dans JLH. Ron a également joué dans Bad Wizard avec Tbone, nous avons donc tous une amitié de plus de 20 ans.
Jane Lee Hooker s’est formé au départ juste pour le plaisir. Je pensais que nous allions juste faire des reprises de blues, car Tbone et moi pouvions jouer ensemble pendant des heures.
Quand nous avons été présentées à Dana, il est devenu évident qu’ensemble nous avions quelque chose de spécial, et nous sommes devenus sérieux.

Un mot sur le choix du nom du groupe ?
Tracy Hightop:  Au début, nous cherchions toujours un nom.
Nous avions des listes et des listes de noms. Nous avons demandé à un propriétaire de club local de nous laisser jouer tous les mercredis soir, mais nous avions besoin d'un nom.
Je ne me souviens pas laquelle de nous a trouvé "Jane Lee Hooker" - un nom en l'honneur de l'une de nos plus grandes influences, John Lee Hooker - mais nous avons gardé ce nom pour ces soirées.
En quelques semaines, nous avions de plus en plus de monde, nous avons créé une sorte de buzz, et les choses ont décollé très rapidement.
Comme nous ne voulions pas perdre l'élan que nous avions pris en tant que Jane Lee Hooker, nous avons décidé de garder ce nom.
L’idée n’était pas d’inventer un nom original, mais ce nom est resté et comme nous ne cesserons jamais d'aimer John Lee Hooker, nous l’avons gardé.








Quelles sont tes influences musicales ?
Tracy Hightop:  Mes groupes préférés sont The Rolling Stones, Lynyrd Skynyrd et X.
J'aime aussi beaucoup The Police et j'ai passé beaucoup de temps à jouer de la batterie sur tous leurs albums.
J'ai grandi en jouant de la guitare avec Muddy Waters, John Lee Hooker, Johnny Winter et les Stones.

Votre clip "Mama said" est un clip et un d'œil au clip "Waiting on a friend" des Rolling Stones. Qui a eu cette idée, comment s’est passé le tournage ?
Tracy Hightop: C'était mon idée, j’en ai parlé à la célèbre réalisatrice Lola Rock n Rolla qui a tout monté.
C’est un génie, elle a tourné et réalisé la vidéo dans la plupart des lieux réels de la vidéo d'origine.

Depuis la création du groupe en 2013, comment décrirais-tu votre évolution ?
Tracy Hightop: Nous avons commencé en tant que groupe de bar, et lorsque nos étoiles sont entrées en collision et que nous avons rencontré Dana, nous sommes passées à un autre niveau de jeu et d'écriture.
Dana est un auteur-compositeur incroyable et nous avons très vite commencé à écrire des compos ensemble.
Le niveau de musicalité a continué à monter et à monter, puis avec la tournée, nous sommes devenues une unité incroyable. Tina, Mary et moi avions joué dans tellement de groupes ensemble pendant tant d'années que nos côtelettes se multipliaient à chaque fois que nous étions dans la même pièce.
La rencontre avec Ron, qui est de loin l'un des plus grands batteurs de la planète, nous a amenées à un niveau de musicalité et d'écriture encore plus élevé.
J'ai toujours dit qu'avant de rencontrer Dana, nous nous entrainions juste pour devenir suffisamment bonnes pour avoir Dana dans le groupe.
Maintenant, j'ajoute qu'avant que Ron ne rejoigne le groupe, nous nous entrainions juste pour être assez bien pour avoir Ron dans le groupe.
Ce groupe a toujours eu une trajectoire orientée vers le haut !

Vos 2 albums ont été produits par Matt Chiaravalle, qui est réputé comme extrêmement créatif, avec un travail très personnel. Comment s’est passée votre rencontre, qu’a-t-il apporté à JLH ?
Tracy Hightop: Matt est un génie. Il tire le meilleur parti de nous en nous laissant être nous-mêmes et en le capturant très facilement.
C'est aussi un mec génial avec qui nous avons plaisir de partager des moments, nous travaillons tous ensemble de manière transparente.
Ce qui est amusant, c’est que Matt a enregistré et produit la toute première démo de Spermicide et la démo de Helldorado.
Il a une véritable empreinte dans notre histoire, nous le connaissons depuis plus de 20 ans.

Comment créez-vous vos chansons, de la compo à l'enregistrement?
Tracy Hightop: Nous le faisons de deux manières : Dana est une auteure très prolifique, c’est toujours elle qui écrit et envoie de nouvelles chansons au groupe.
Je me réveille, je regarde mon téléphone, et ce sera un autre morceau incroyable que Dana a écrit ce soir-là sur sa guitare ou son clavier.
Puis le groupe se réunit et jam dessus. Notre nouvelle chanson, « Jericho » en est un parfait exemple. L'autre manière est d’aller simplement en studio avec un riff de guitare, et Dana va créer sur place une mélodie et des paroles, puis nous laissons mijoter.
Les deux façons sont passionnantes.









Tu joues souvent sur une Gibson Les Paul, quelles sont tes autres guitares et quelles sont tes préférées ?
Tracy Hightop: J'en ai d'autres. Pendant les premières années de JLH, j'ai utilisé une SG 1968 customisée avec 3 micros Humbuckers qui sonnent fort et ont un son très chaud.
Ensuite, je suis revenue sur Les Pauls que j'ai toujours privilégié car elles sont confortables à jouer.
La guitare qui a le meilleur son et que je possède est la 68 SG. Ma guitare préférée est la Goldtop Les Paul Deluxe 1976.

On espère un 3ème album, quand est-il prévu ?
Tracy Hightop: Oui, nous y travaillons! Nous l'avons écrit et nous l'enregistrerons en septembre!

Si tu devais définir Jane Lee Hooker en un mot ?
Tracy Hightop: Blues rock à grande vitesse.

Comment as-tu vécu la période de confinement ? Avez-vous pu réussir à travailler avec le groupe ?
Tracy Hightop: Ça a été un défi. Il est difficile de croire que cela s'est produit, mais cela s'est produit et nous y avons fait face de notre mieux.
Nous avons perdu un ami proche.
Au début, on enregistrait des riffs et des morceaux de chansons et on se les envoyait les unes aux autres.
On faisait des visio par Zoom. C'était triste, franchement, parce que cela nous manquait d'être ensemble.
Dès que la situation est devenue plus sûre, nous avons commencé à nous retrouver dans la cour arrière de Dana à Bay Ridge avec des guitares, des batteries et des poubelles à seulement 2 m de distance, mais enfin ensemble.

Comment ressens-tu les pressions sociales qui se multiplient aux Etats-Unis, le mouvement « Black lives matter », la révolte contre les violences policières, le racisme… ?
Tracy Hightop: C’est difficile pour moi d’imaginer qu’à ce stade, nous sommes toujours confrontés au racisme et aux inégalités.
Comment est-il possible que je puisse marcher dans la rue à côté de quelqu'un qui ne pense pas que tous les humains et toute l’humanité sont égaux?!
Cela me met en colère au point que je doive me raisonner pour ne pas me rendre malade.
Je suis musicienne depuis toujours, j'ai même l'impression que les vies noires comptent PLUS.
La musique m'a apporté plus de joie dans ma vie que toute autre chose (autre que ma famille) et tout ce que je fais musicalement vient des Noirs avant moi.
J'ai plus de respect pour ces pères fondateurs que quiconque.

Pour finir, si tu ne devais conserver que 3 choses : un disque, un film, et un 3ème choix ? Quelle serait ta sélection et pourquoi ?
Tracy Hightop:  Un disque : "Hard Again" de Muddy Waters, un film : “Le Parrain”, un livre : "Une prière pour Owen", de John Irving. 

Merci à Tracy pour cette interview.



Th Cattier - Photo : Collection Jane Lee Hooker et Shooting Idols, Th. Cattier