BLACK BOMB A est de retour avec son huitième album Unbuild The World et s’apprête à célébrer ses trente ans d’existence rien que ça ! Le moins que l’on puisse dire c’est que nos vétérans ont toujours la foi et n’ont rien perdu de leur puissance de feu bien au contraire. Le gang Parisien s’avère être un vrai char d’assaut prêt à tout éradiquer sur son passage. Enregistré entre les mythiques studios ICP à Bruxelles et le studio Sainte-Marthe à Paris, réalisé par Francis Caste, Unbuild The World est un véritable cri de révolte, une déclaration de guerre contre l'oppression et l'injustice. Les membres du groupe expriment leur colère et leur frustration à travers des compositions puissantes et des performances vocales incendiaires par l’intermédiaire du duo Poun et Arno qui brille de mille feux. La révolte et la hargne coule toujours dans leurs veines et n’est pas près de s’arrêter tant les injustices sont légion dans notre société contemporaine. C’est avec les sympathiques Poun et Snake respectivement chanteur et guitariste de la formation que nous avons pu nous entretenir afin de faire le point sur ce parcours incroyable et découvrir ce nouveau méfait fait pour vous scratcher les neurones qui prouve qu’ils sont bel et bien là et en pleine forme. Magnéto les gars c’est à vous.
Vous allez fêter vos trente ans de carrière cette année, quel regard portez-vous sur ce parcours incroyable et la sortie de ce huitième opus ?
Poun. Je pense qu’on a eu du courage de tenir jusque-là (rires). Généralement quand tu crées un groupe tu as toujours la tête dans le guidon en ne regardant jamais trop derrière toi. Au bout de trente ans on arrive à regarder un petit peu derrière nous. On a abattu pas mal de travail, on en est quand même à notre huitième album. Il y a des choses qui se sont faites avec plein de souvenir et plein de belles choses.
Qu’est ce qui fait que vous êtres toujours là trente ans après. Est-ce que le parcours a été facile, difficile, avec un peu de chance aussi ?
Snake. C’est un peu un mix de tout ce que tu viens de dire et également beaucoup d’envie. Une envie de dire des choses à travers notre musique surtout.
Poun. Ça fait trente ans. On est arrivé en 1994. C’était une période qui était un peu sur la fin du metal punk hardcore, les années 90s où c’était une superbe belle époque. Ça fait un peu vieux con de dire ça mais c’est vrai que c’était assez riche en musique et le néo métal est arrivé aussi. Période de signature où il y avait pas mal de groupe qui émergeait. On est arrivé à ce moment-là. Après c’est du travail, on sait croire en son projet et le vivre aussi.
Comment analyser vous cette époque par rapport à maintenant ?
Poun. C’est complètement différent j’ai l’impression.
Snake. Là on est plus dans l’air d’internet. Tout ça n’existait pas à cette époque. Ça ne fonctionnait pas du tout de la même manière. Pour les concerts j’ai le sentiment que c’était aussi différent. Il y avait vraiment un engouement autour de cette nouvelle vague qui arrivait justement. Maintenant il y a beaucoup de groupes qui tournent ce qui est hyper bien aussi. Le ressenti pour ma part est qu’il faut vivre avec son temps, les années passent mais il faut évoluer dans la manière dont ça se passe.
Comment avez-vous travaillé sur cet opus, est-ce que c’était une volonté de prendre votre temps pour préparer cet album ?
Poun. Non tu peux dire qu’on est des sacrés branleurs (rires). Je pense que l’on a profité des choses, de faire des dates et on n’a pas tant profité que ça car il y a eu la période du Covid où on était en confinement par la force des choses et on ne voyait pas l’utilité de sortir un album pour se retrouver confiner sans pouvoir le défendre sur la route comme c’est arrivé à pas mal d’autres groupes. C’est vrai qu’on a pris pas mal de temps. Avec BBA on a toujours été dans l’urgence dans notre façon d’écrire. Après on tend à travailler autrement et on va y arriver je pense. Notre façon de travailler sur l’album a été différente au niveau de la composition. Sam pourra plus tant parler.
Snake. Cela a pris du temps pour annoncer l’album mais cela s’est fait relativement assez vite en fait. On va dire qu’au mois de mai on était en tournée et puis on s’y est mis derrière. Ça s’est fait dans l’urgence comme à notre habitude mais au niveau de la composition ça s’est fait différemment. C’était vraiment intense la manière de fonctionner très vite, intense d’un coup.
Poun. Déjà notre travail a été différent dans le sens où on ne s’est pas enfermé dans un studio tous les cinq a brainstormer. Tu avais déjà de la matière et tu as travaillé avec Jordan, et Etienne un des nouveaux membres du groupe aussi.
Snake. Tout à fait et c’était surtout très efficace. Etienne et Jordan qui sont arrivés depuis un an avec beaucoup d’envie, de motivation et beaucoup d’idée. Ça été vraiment super.
Comment s’est passé l’intégration de Jordan Kiefer votre nouveau batteur et Etienne qui avait joué à vos côtés de 2004 à 2011 et effectue son grand retour ?
Poun. C’est sur ça apporte quelque chose de plus frais parce que tu retravailles autrement ne serait-ce que pour la batterie, avec Hervé il avait bien son jeu à lui, et Jordan a son jeu à lui aussi, plus actuel.
Snake. Ce n’est pas du tout la même époque ni les mêmes personnages. C’est sûr dès qu’un musicien amène sa patte le son est différent. Jordan est d’une école un peu new metal qui est complètement différente de celle d’Hervé. Je pense que ça va se ressentir dans les nouveaux morceaux.
Hervé est resté 22 ans dans le groupe, qu’est ce qui a fait qu’il a décidé d’arrêter ?
Poun. Ce serait un peu à lui de te répondre mais je pense qu’il était fatigué, qu’il en avait assez de la route aussi. Il n’a pas que nous, il a Loudblast et d’autres projets. Il a commencé bien avant nous d’ailleurs, donc ça se comprend qu’un peu de fatigue se fasse. Rien à voir avec l’entente on reste amis et on restera toujours amis.
Il y a eu beaucoup de changement au sein de Black Bomb A au fils des années mais finalement vous rester toujours proche les uns des autres.
Poun. On le voit un petit peu comme ça, je ne sais pas si ça se passe comme ça comme on parlait de la nouvelle génération et des groupes qui prennent des musiciens, qui voient si ça marche ou pas et basta. Nous quand on a monté le groupe c’était une histoire d’amitié. Aussi on trainait déjà ensemble avant. On est de l’ancienne école, on a besoin de sentir quelque chose ensemble, d’être amis. On ne peut pas faire de la musique parce que c’est le meilleur batteur ou le meilleur chanteur. il faut qu’il y est une alchimie parce que l’on part sur la route, ensemble dans les studios. On vit plein de choses parfois on s’engueule, parfois on s’embrasse c’est la vie en fait. C’est ce qui fait que c’est BBA aussi.
Il y a huit morceaux dont deux préludes. Est-ce que vous composez beaucoup pour ensuite ne sélectionner que les meilleurs ou simplement vous écrivez ce qu’il faut pour l’album ?
Poun. Il y a toujours un projet d’écrire plein de titres. Sam te répondra plus mais je pense qu’il compose beaucoup de riffs, de structures pas forcément abouties donc il y a beaucoup de matière. Mais la finalité c’est eux qui ont cherché au niveau de la musique tous les trois.
Snake. Après on compose toujours plus de ce qu’il y a sur l’album forcément. On fait une espèce de sélection. Ça va assez vite après de toute manière, on essaie de ne pas trop s’écarter de notre chemin parfois on peut faire des propositions qui peut paraitre…C’est intéressant aussi parce que ça permet de sortir des sentiers battus. Pour répondre à ta question on compose beaucoup plus de titres en général, en tous cas plus d’idées que ce qui figure sur l’album ça c’est sûr et certain. Je pense que tout un tas de groupe fonctionne comme ça aussi, c’est normal tu essaies d’en tirer le meilleur.
Francis Caste a entièrement mixé et enregistré l'album à l’ICP à Bruxelles et au Studio Sainte Marthe son fief. Comment vous avez vécu l’expérience ? Francis a la réputation d’être exigeant en règle générale.
Snake. Ça c’est plutôt super bien passé je dirai à l’ICP on a enregistré que les batteries. Je suis parti avec Francis et Jordan là-bas. On n’avait pas eu d’expérience d’enregistrement à l’ICP qui est vraiment un super beau studio. C’est vraiment énorme cela est allé assez vite car le temps était malheureusement compté, tu n’as pas besoin non plus de semaines et semaines.
Poun. Ça coute de l’argent aussi.
Snake. Ça s’est vraiment bien passé avec Francis. On s’entend super bien. Il a de bonnes idées c’est vraiment quelqu’un qui sait te mettre à l’aise. Effectivement il est très exigeant et il a quand même les bons mots pour que ça avance d’une manière efficace.
Pourquoi avoir fait appel à lui ?
Poun. C’est un essai manqué comment dire on avait fait la moitié de l’album comme tu disais avant l’album éponyme BBA on avait fait juste le mix basse batterie et mix.
Snake. Il avait fait basse batterie et mix.
Poun. On n’avait pas fait les guitares et le chant. A la fin de la session de cet album là il nous avait dit je suis quand même déçu, j’aurais bien aimé faire la totalité. Il aurait voulu faire la totalité, avoir la main mise sur le tout et pouvoir y réfléchir par rapport à la suite. Nous ça nous était resté dans le crâne et on s’était dit que l’expérience avait été plutôt positive avec lui et on est parti pour le faire avec lui.
Est-ce que l’on a un son particulier en tête lorsque l’on travaille avec Francis ?
Poun. Toujours quand tu arrives, chez Francis ou n’importe qui quand tu es un groupe on reste toujours des fans et on écoute tout un tas de groupes. On lui a dit qu’on aimerait bien sonner comme BBA mais avec ce côté comme ci comme ça.
Snake. Après il fait toujours aussi sa pâte pour faire en sorte aussi que le son de l’album en lui-même est sa propre personnalité même si ce n’est pas non plus pour être une pâle copie d’untel ou d’untel. Au niveau du son pour la guitare il a vraiment apporté de nouvelles idées que j’ai trouvé vraiment bien cool même si ça été beaucoup de travail finalement mais s’est avéré très utile. J’en suis vraiment très content.
Il y a aussi une très belle pochette.
Poun. Notre graphiste ami Fred. Fred qui a travaillé sur plusieurs albums.
Snake. Il a déjà fait Speech of Freedom, From Chaos, One Sound Bite to React.
Quelle est l’idée derrière ?
Poun. L’idée elle n’est pas forcément conceptuelle, elle est déjà esthétique parce que nous on la trouve magnifique mais l’idée c’est ce personnage qui est face à un monde à reconstruire à déconstruire, déconstruire pour pouvoir reconstruire peut-être.
Le single “Crashboys“ est-ce c’était une évidence que ce titre sorte en avant première avant la sortie de l'opus le 29 mars ?
Poun. C’est vrai que ça été un peu une évidence même si sans vouloir dévoiler les choses je pense que nos fans risquent d’être dérouté en écoutant le reste de l’album qui n’est pas forcément à l’image de Crashboys mais pour nous c’était une évidence de le mettre en avant sur le premier titre parce que c’était un morceau à part et c’était intéressant de le mettre devant.
Snake. Le contenu du reste de l’album est bien différent sur certains points mais ça n’est pas plus mal dans un sens la surprise est là.
Vous aviez envie de quoi sur ce huitième album, une volonté de vous démarquer ?
Snake. Musicalement en tout cas avec Jordan et Etienne qu’ont une approche différente que Hervé et Jacou anciennement. Un renouveau, quelque chose de plus actuel certes avec musicalement plus d’effet plus de sonorité différente de ce que l’on pouvait faire avant. Je trouve que l’on a bien réussi notre truc vraiment ; on en est super content. Pour les textes je laisserai Poun te répondre.
“Crashboys“ c'est un message de colère, de frustration vos thèmes de prédilections ?
Poun. En fait je me baladais sur le net et je suis tombé sur Crashboy au Etats Unis. Ce sont des mecs qui font du vélo de streets et j’ai fait un parallèle avec ce côté rentre dedans, les mecs qui « fuck the life » et puis on avance et rien ne t’arrêtes. J’ai fait ce parallèle mais rien de plus.
Est-ce qu’il y a des textes qui sont importants pour vous sur cet opus ?
Poun. Les textes restent toujours importants après c’est mon opinion, on ne fait toujours que de la musique chacun a une interprétation de nos textes d’ailleurs, qui n’est pas forcément celle donnée à la base mais qui est intéressante aussi. Il y a des textes qui me touchent vraiment comme des textes sur le harcèlement ou sur la mort. Tout un tas de choses comme ça qui sont un peu plus profondes qu’on n’a pas forcément écrit jusqu’à présent dans BBA mais on a voulu l’écrire non pas parce qu’il fallait l’écrire mais parce qu’on était touché à un moment dans notre vie pour pouvoir parler de ce sujet-là.
Unbuild The World quel est l’idée l’idée développé à travers ce titre ?
Poun. C’est facile de dire détruisons le monde mais là c’est plutôt le déconstruire et le reconstruire autrement avec de nouvelles idées peut être mais pas forcément tout détruire. Ce serait pourquoi faire ensuite.BBA le A à l’époque c’était pour anarchie.
Quel est votre rapport à l’anarchie par rapport à tous ce qui est arrivé dernièrement. Quelle est votre philosophie par rapport à ce mouvement ?
Poun. Forcément elle n’est plus la même que quand on avait seize ans. On a été touché par d’autres réalités qui font qu’anarchie ce n’est plus mettre un T-shirt A et puis gueuler anarchie dans la rue. Je ne me proclamerai pas anarchiste d’ailleurs ou d’un autre parti ou quoi que ce soit. Est-ce que ce n’est pas être ça anarchiste ne faire partie d’aucun drapeau.
Snake. “Raise no Flag“
Finalement le rôle d’un combo quelque part c’est aussi de contester de dénoncer certaines idées et fait de société.
Poun. Je ne sais pas si tu n’en as pas vraiment envie, il ne faut pas le faire parce que tu fais du metal ou que tu fais du rock je pense que c’est plus original si tu parlais de fleurs si tu fais du rock ou du death metal (rires). Il ne faut pas se sentir obligé, faut écrire ce que tu as sur le cœur avant tout.
Vous êtes deux chanteurs toi Paun et Arno. Comment ça se passe finalement, est-ce que vous travaillez ensemble ou chacun écrit ses textes de son côté ?
Poun. Chacun écrit ses textes. Avant on travaillait ensemble mais c’est toujours assez compliqué d’écrire pour l’autre je trouve même au niveau des pieds de ce que l’on veut dire. On part sur un sujet s’il y en a un qui a une inspiration sur un texte il dit à l’autre j’ai envie de parler de ça et l’un des deux commencent à écrire le texte et envoie à l’autre chanteur et ensuite il y a une réponse qui se fait par rapport aux premiers écrits.
Quelles sont les périodes qui ont été fondamentales pour BBA, les albums ou les moments qui vous ont permis d’avancer ?
Poun. La première époque bien sur le Human Bomb.
Snake.Oui pour l’histoire d’un groupe bien souvent ce sont les premiers albums qui sont fondateurs.
Snake. Tout a été un peu étape, Black Bomb aussi.
Poun. On a rencontré les Watcha, les Lofos on est parti en tournée et nous ont amené avec eux. Sans eux il y aurait plein de choses qui ne se seraient pas passés aussi.
Snake.Effectivement quand on a sorti Human Bomb on était déjà sur la route avec Lofos. Cela nous a apporté énormément de choses comme Speech of Freedom que beaucoup de monde ont apprécié ce qui nous a fait franchir un pallier différent. On va faire en sorte que ça continue.
Si vous deviez présenter « Unbuild The World » que diriez-vous ?
Poun. C’est l’album de ta vie (rires)
HardRock Café 16 Février 2024.
Pascal Beaumont / Photos DR
Pascal Beaumont et Laurent Machabanski (Traduction / Retranscription)