Depuis la sortie de Shehili en mai 2019 MYRATH s'est envolé vers de nouveaux sommets bien décidé à s'élancer à la conquête du monde afin d’imposer son "blazing desert metal". Le gang a eu l'intelligence de ne pas s'enfermer dans la niche Prog Métal et d'amener des sonorités Pop Rock, tout en gardant cette ambiance oriental, ce qui leur à permis de séduire un nouveau public. S'en est suivit en tournée Européenne en ouverture de Beast in Black fin 2019 pour assurer la promotion de leur nouveau méfait sur scène. Mais les bougres étaient bien décidés à battre le fer tant qu'il était encore chaud et se sont embarqué ensuite pour le The Magical Tour 2020 qui a débuté le 27 février 2020 à Sofia et qui a été stoppé net par le confinement de mars 2020. Un véritable coup dur pour MYRATH qui était en passe de s'imposer au niveau Européen et de porter haut en couleur le Metal Tunisien, le combo étant devenu au fil du temps un ambassadeur de grande classe de son pays. Heureusement pour nous faire patienter il nous reste le Live in Carthage enregistré dans leur fief en Tunisie en juillet 2018 qui confirme tout le bien que l'on pense d'eux et apporte un côté festif et joyeux en ces temps difficiles. Un opus d'excellente facture qui nous plonge au fin fond de leur univers ou les magiciens et les danseuses orientales ont leur mot à dire, un vrai spectacle pour les yeux et les cages à miel ! Il était grand temps pour eux de revenir avec un opus studio c’est chose faite avec Karma qui consolide sa place dans les hautes sphères de la scène Metal avec un mélange puissant et captivant de mélodies orientales et de Heavy Metal occidental. Karma qui vous entraine dans un voyage théâtral à travers un monde de mythes et de légendes. Pas de doute MYRATH est au sommet de son art grâce à ses envolées vocales, ses riffs de guitares sophistiqués et sa batterie complexe nous démontre toute sa virtuosité et sa créativité et son inspiration. Inutile de vous dire qu'il n'en fallait pas plus pour qu'un rendez-vous soit pris afin d'éclaircir un peu plus les mystères de cette formation hors norme doté d'une volonté impressionnante qui lui a permis de surmonter de nombreux obstacles ! C'est avec Kevin Codfert qui vient depuis 2022 d’intégrer définitivement la formation aux claviers et qui se charge aussi de la production de la formation depuis leur premier opus Hope et Morgan Berthet batteur au sein de MYRATH depuis 2011 que votre serviteur a pu s'entretenir. Un entretien placé sous le signe de la décontraction pour comprendre un peu mieux d'où vient le combo qui ne doit sa réussite qu'à lui-même, à son talent et au Karma bienveillant qui veille sur eux ! Vous avez dit miracle ou est-ce encore un tour de magie à la MYRATH ? Magnéto Kevin et Morgan c’est à vous !
Vous avez beaucoup tourné en 2023 que ce soit en Europe ou en Amérique Du Sud. Il y a eu un évènement important pour vous c’est votre show à Clisson le 15 juin 2023 au Hellfest. Comment avez-vous vécu ce concert ?
Kevin Codfert. Cela a été une grande surprise le Hellfest. La tente à une capacité de 8000. On était vraiment surpris de voir le public dépasser, ce qui a été une preuve d’une attente qu’il y avait de voir le groupe. Ça fait plaisir, ça fait des années que tu travailles les territoires, la France est un territoire qui n’est pas toujours simple. Tu vois un tel engouement avec un public qui te suit, qui accroche sur les nouveaux morceaux puisque l’on a fait le pari de jouer en avant-première certains morceaux avant la sortie de l’album. Ce n’est pas toujours évident de faire découvrir des morceaux que les gens ne connaissent pas dans des conditions acoustiques qui ne sont pas forcément optimales, ça peut être un risque, risque que l’on a décidé de prendre. C’est important aussi de tester les choses sur scène et voir le ressenti en live des gens. Une grande expérience et beaucoup d’émotions pour nous. Le sentiment que j’avais était un sentiment de réussite.
Le 13 septembre, vous avez donné un concert à Carthage en Tunisie qui a été capté en vidéo et utilisé pour le clip de votre nouveau single “Child Of Prophecy“ Comment avez-vous vécu ce moment toujours un peu spécial ?
Morgan Berthet. C’est toujours un peu spécial. La Tunisie on sait qu’on va être accueilli comme des rois parce qu’on est tunisien. C’est toujours ultra agréable de jouer en Tunisie et je pense si je ne dis pas de conneries qu’on a autant eu de moyens dans un concert au niveau scénique. J’ai personnellement découvert ce qui allait se passer le jour J. Je n’avais pas pris la peine de regarder ce qui allait être fait. Visuellement Kev s’est chargé de tout ça et c’était impressionnant pour nous de nous retrouver sur une scène pareil. On avait déjà fait Carthage, on avait mis des gros moyens mais là on s’est vraiment surpassé cette fois ci. Super concert, toujours super, concert de mieux en mieux.
Quelque chose qui a dû aussi vous marquer c’est la tournée en Amérique du Sud l’année qui a eu lieu du 22 avril au premier mai 2023. C’était la première fois que vous vous produisiez là-bas ?
Kevin Codfert. Ça nous a doublement marqué pour deux trucs. C’est la tournée la plus compliquée qu’on est eu à gérer avec des problèmes absolument tous les jours dès le départ. Des problèmes de visa, de passeport, des problèmes de tout, de logistique énorme en revanche toutes les dates avec le public d’Amérique latine nous ont fait oublier ces soucis tous les soirs parce que c’est vraiment une ambiance. On m’avait prévenu que c’était quelque chose à part l’Amérique latine mais je n’étais pas préparé à ça. Ce sont vraiment des gens qui dix minutes avant de monter sur scène et dix minutes après avoir terminé le dernier morceau ne sont jamais dans le silence. Ce sont des gens qui n’arrêtent pas de chanter, de danser, de pleurer. C’est assez riche en émotion. Toutes les dates peu importe qu’ils soient trois cents ou dix mille parce que c’est le max qu’on a pu faire là-bas. C’est pareil on a l’impression de jouer devant deux à trois mille personnes tous les soirs. Très compliqué comme tournée mais vraiment enrichissante et on avait vraiment besoin de cela. C’est tombé nickel.
Vous avez un show très visuel avec une belle mise en scène. Comptez-vous le développer d’une autre façon pour les prochaines tournées ?
Morgan Berthet. Il faut toujours aller plus loin et composer avec la logistique et les budgets. Je vais prendre l’exemple d’un groupe comme Sabaton qui comme tout le monde le sait amène un tank sur scène. Ce qui s’est passé au départ pour Sabaton pour des raisons logistiques ils amenaient le tank un concert tous les dix concerts et ils faisaient beaucoup de communication où ils amenaient le tank pour essayer de créer en tous cas une image où les gens pouvaient reconnaitre et identifier facilement le groupe. Pourquoi finalement ? Parce que pour un combo il y a quinze ans qui était moyennement connu comme Sabaton ça aurait été impossible d’amener ce tank tous les jours. Pourquoi je fais cette analogie avec MYRATH, c’est la même chose, c’est-à-dire quand tu as des budgets pour la logistique tu as forcément des contraintes. Donc en fonction de la configuration on réfléchit à une mise en scène qui rentre dans les clous de la configuration en essayant d’être le plus créatif possible. Qu’est-ce que ça veut dire ? A Carthage où le groupe est très connu on peut consommer une partie du budget en réfléchissant à une certaine mise en scène ou dans d’autres cas de figure, on va réfléchir à une autre mise en scène en fonction du budget. On va avoir une démarche très élastique au niveau du jeu et de l’implantation scénique de tous les éléments.
Comment avez-vous vécu la composition, le processus et la création de ce nouvel opus ?
Kevin Codfert. La composition de l’album s’est faite pendant le Covid. On a été en tournée en Europe quand il y a eu la fermeture des frontières. Nous étions à Leipzig qui est un petit village en Allemagne. Nous en tant que ressortissant français on a pu rapidement rentrer chez nous mais cela n’a malheureusement pas été possible pour les trois tunisiens de la formation. Le gouvernement n’a pas affrété d’avion. En fait les mecs m’ont dit Kev qu’est-ce qu’on fait ? J’ai dit « Venez à la maison je vous héberge, on va essayer de trouver une solution » et en fait ce qui s’est passé c’est que l’on n’a pas réussi à trouver de solutions pendant six mois. Six mois pour Anis et six mois pour Malek et Zaher. Situation compliquée car tu te retrouves à la maison avec six gars, ma femme et mon chien. Faut cohabiter et capitaliser là-dessus et c’est dans ce contexte là qu’on a composé la majorité de titres. C’est ce qui fait la grande différence d’ailleurs entre ces albums là et les précédents. La composition s’est faite avec des musiciens qui était en face d’autres musiciens et qui pouvait composer en temps réel comme n’importe quel groupe normal pourrait faire. Ça peut sembler banal ce que je te raconte mais cela n’a jamais été le cas pour MYRATH car pour des raisons géographiques on a toujours beaucoup utilisé internet, les mails pour s’échanger des idées avec une démarche très digitale. On était en face les uns des autres et ça a modifié aussi notre façon de composer je pense. C’est album est spécial pour ça parce que finalement tous les processus qui ont été mis en place ont été un petit peu chamboulé. C’est ce qui nous a permis de proposer quelque chose d’un petit peu différent.
Comme tout le monde le sait c’est toi qui t’occupes de l’enregistrement et de la production des albums de MYRATH depuis Hope. Est-ce cette fois çi que vous vous êtes fixé dans un seul studio contrairement à la dernière fois où vous avez travaillé en France, en Allemagne et en Tunisie ?
Kevin Codfert. La majorité des enregistrements ont été réalisés chez moi à l’exception des batteries. On s’est focalisé sur un studio car cela faisait longtemps qu’on voulait travailler avec Jacob Hansen. C’est un super pro qui a une approche métal mais à la fois organique surtout dans le traitement des batteries qui a une vision et une intelligence du son. Cela fait très longtemps qu’on voulait bosser avec lui et lui aussi et ça tombait bien. C’était le moyen le plus facile de travailler avec une seule personne, une cohérence de son le plus rapidement possible, forcément quand tu multiplies les studios tu multiplies derrière le travail de postproduction, de rendre compatibles toutes les sources sonores. Cela n’a pas été le cas sur cet opus. On est super content du résultat parce que Jacob a une vision du son qui lui est propre et qui est reconnaissable.
Vous avez confié le mastering à Jacob Hansen aviez-vous un son particulier en tête pour Karma ?
Kevin Codfert. Non on a le même état d’esprit. Je n’en ai pas fait ma carrière de producteur exécutif et d’ingénieur du son mais les outils que j’ai en ma possession et que je maitrise m’ont permis de pouvoir parler le même langage et quand tu parles le même langage que quelqu’un d’aussi chevronné que Jacob les choses sont très fluides et la répartition des taches aussi. Il n’y a pas eu de questions à se poser sur qui faisait quoi. On utilise le même wording et les mêmes mots pour dire la même chose et on allait dans la même direction. Morgan pourra te raconter comment ça s’est passé pour les batteries.
Morgan Berthet. C’est allé très vite mais presque grâce à lui entre le montage et l’accordage et disons le moment où j’ai commencé à enregistrer il s’est écoulé littéralement une heure. Il connait sa pièce parfaitement, les micros parfaitement, j’utilisai sa batterie et son matériel. Tout marche immédiatement c’est très bien et c’est un plaisir de bosser dans ces conditions. Il y a tout qui sonne directement. Tout est allé très vite. J’avais cinq jours pour enregistrer et je n’en ai utilisé que deux grâce à lui aussi. Ce qui nous a permis d’avoir plus de temps pour la production du chant parce qu’on a vraiment soigné cela plus que sur les autres albums. Un vrai plaisir de bosser avec lui et surtout quelqu’un d’ultra efficace.
Beaucoup de singles ont étté mis en ligne bien avant la sortie de Karma “Candles Cry“, “Into The Light“, “Child Of Prophecy“, “Let It Go“, “Heroes“, le clip de “Candle Cry“ est magnifique et nous plonge dans un univers de guerre. Qu’est-ce que vous vouliez transmettre à travers cette mise en scène et ces images particulièrement dures tourné à Belgrade en mai dernier ?
Kevin Codfert. On voulait transmettre des idées très larges qui n’étaient pas corrélées aux guerres qu’on a pu vivre ces dernières années puisqu’on a shooté le clip avant le conflit israélo palestinien, et pendant le conflit ukrainien. Le sujet n’était pas là. Le sujet était de parler de la perte de libre arbitre que peuvent avoir certaines personnes et ces personnes-là étaient des soldats où finalement le soldat ne sais plus vraiment si la mission qu’on lui a donnée est une mission qu’il supporte, qu’il comprend et que n’importe quel soldat peut se retrouver dans n’importe quel musicien et vice versa. C’est une façon forte et minimaliste simple d’exprimer une lecture de perte de libre arbitre. Et pour mettre ça en lumière on a fait appel au producteur du clip « Papaoutai » de Stromae (Ndr : Raf Reyntjens) qui est brillant pour mettre en lumière ce genre d’idées et mettre des images sur des idées. Le travail s’est fait de manière très fluide. On a eu un mois de préparation pour écrire le scénario donc le prod qui s’appelle Raf a fait un aller-retour en Serbie pour aller faire un repérage, voir les équipes techniques, l’éclairage les bâtiments etc. Une fois que tout était calé on est tous arrivé là-bas tout était prêt, on a pu shooter en deux jours.
C’est aussi la première fois que tu poses ta voix sur un morceau. Cela a dû être une expérience intéressante pour toi ?
Kevin Codfert. Tout à fait d’ailleurs ça s’est fait sur une erreur. J’ai tendance si tu veux quand on fait les démos et les maquettes du groupe à chanter pour expliquer les idées à Zaher. Ce qui s’est passé sur “Candles Cry“ il m’a dit : « Ecoute tu n’es pas un chanteur mais j’aime bien l’émotion quand tu le fais et je pense que ce serait bien que tu le chantes car si je chantais je le ferai de manière différente et les émotions seraient peut-être différentes ». Il m’a demandé si je voulais garder mes lignes de chant sur l’album définitif.
Ça t’intéresserait de recommencer sur d’autres morceaux ?
Kevin Codfert. Je n’en sais rien du tout. Pas spécialement, on va dire que ma voix sur ce morceaux-là est un outil et comme n’importe quel outil il faut savoir l’utiliser à bon escient. Donc si l’outil vocal est utile pour les prochains morceaux oui sinon non.
Comment fait-on pour choisir les morceaux qui vont devenir des singles ça ne doit pas être évident ?
Morgan Berthet. Déjà ce n’est pas facile et suivant ce qui se passe en l’occurrence, nous, cela a été chamboulé par plein de trucs vu que l’album était prévu pour septembre et sorte six mois après. Finalement ça change un peu les trucs. Cette guerre israélo palestinienne a aussi changer l’ordre des singles, il y a plein de trucs qui rentrent en jeu comme ça, l’ordre a changé entre juillet l’année dernière et septembre.
Kevin Codfert. Pour apporter une précision quand on dit que la guerre a changé l’ordre c’est qu’on a dû repousser “Candles Cry“ car on ne voulait pas de récupération politique parce que la vidéo n’avait pas été faite pour des velléités politiques.
Est-ce que vous avez d’autres clips en préparation ou maintenant vous vous focalisé sur la sortie de Karma ?
Kevin Codfert. D’abord la sortie de l’album qui est dans trois jours, donc faire un clip avant la sortie ça va faire un peu juste.
Morgan Berthet. Pour nous c’est la première fois qu’on en sort autant avant la sortie de l’album. Presque la moitié du disque.
Kevin Codfert. Je pense que ce n’est pas un mal parce qu’aujourd’hui les promotions doivent s’inscrire de plus en plus dans la durée quand tu es dans le marché du métal, le marché est très compétitif. Tu as des sorties tout le temps c’est plus stratégique et cette vision vient des maisons de disques. Je pense qu’elles ont raison et c’est plus stratégique de faire durer pour commencer à intéresser les médias parce qu’il y a un nombre de sorties incalculables et c’est certainement après deux mois ou trois mois après la première sortie de clip qu’il y a un média qui va être intéresser et va nous aider à faire la promotion par une interview ou par ce genre de choses de ce que je vois les promotions ont tendance à s’étendre en durée de plus en plus.
La pochette est superbe avec ce visage de femme envoutant est ce que derrière l’esthétique il y a un symbole ?
Kevin Codfert. Etrangement on me pose beaucoup la question comme symbole autour de la femme bien que la pochette soit extrêmement bien réalisée, cette femme berbère qui est habillée en amazigh n’est pas le sujet principal de la pochette. Le sujet principal en est la pomme puisque la pomme est nuisant à l’extérieur et pourrie à l’intérieur est une représentation d’un asset minimaliste une représentation minimaliste du nom karma qui lui-même est une représentation en un seul mot des thèmes de l’album. J’aurai tendance à dire que l’élément principal est la pomme qui représente le karma.
Karma est le nom que vous avez choisi justement est-ce par croyance envers le Karma ? Est-ce que c’est quelque chose que vous avez vécu par rapport à certains fait ?
Kevin Codfert. Alors moi malheureusement pas du tout car j’ai une approche trop scientifique des choses et étant donné mon éducation je n’arrive pas à y croire. Je ne suis pas le mieux placé dans le groupe pour en parler sachant que des gens comme Zaher y croit énormément qu’il a construit sa vie et son cheminement de pensée autour de ça et c’est loin d’être une mauvaise chose puisque quand on a cette sensibilité là on greffe sa vie autour de sentiments. Peut-être que sa sensibilité lui permet de voir des choses. Par exemple moi en tant que mec matheux pragmatique je ne vais pas voire donc pour répondre à ta question cela aurait été une très bonne question à poser à Zaher. Je suis trop cartésien pour te dire que je crois au karma.
Morgan Berthet. Exactement pareil, non. On est la partie un peu plus logique de Myrath (rires). Ils ont plus tendance à orienter leur vie autour de ça que nous.
Est ce qu’il y a un texte dont vous vous sentez plus proches et qui est important à vos yeux ?
Kevin Codfert. Tous. Si tu regardes les thèmes de l’album on parle de discrimination, de racisme, de changement climatique. On parle des échecs de la vie, de dépression. Chacun de ses thèmes a ou a été vécu par un ou plusieurs membres du groupe. Nous en tant que travailleur français travaillant avec trois tunisiens depuis quinze ans on sait ce que c’est racisme, les discriminations. On en a encore fait les frais en Amérique du Sud. Les problématiques de visa qu’on a eu ont rendu extrêmement compliqué les routines et c’est quelque chose qu’on vit au jour le jour avec les mecs et on parle presque d’histoire personnelle. Je pense que c’est un moyen aussi en exprimant ces textes de nous guérir de problèmes et de guérir aussi d’autres personnes qui écoute l’album et qui se reconnaissent, qui ont vécu un moment dans leur vie des discriminations, des échecs et ces paroles sont faites pour ces gens-là et pour aider tout le monde à se relever. Pour répondre à ta question tous les textes sont importants pour nous en tous cas.
Ce que tu m’as décrit concernant Zaher Zorgatti (chant), Malek Ben Arbia (guitare) et Anis Jouini (basse) est très violent est à dire que régulièrement vous êtes confronté au racisme et à l’intolérance ?
Kevin Codfert. Tout le temps.
Morgan Berthet. Juste un exemple sur la dernière tournée au moment avant de partir de Serbie. Eux ont été interdit de monter dans l’avion pour zéro raison ; ça a duré une heure et quand les agents de l’aéroport ont compris qu’on était tous ensemble et qu’avec Kevin on a présenté nos passeports français, d’un coup parce que les Tunisiens étaient accompagnés de français cela ne posait plus de soucis. C’est la première fois que je mesure l’injustice que cela doit être pour eux, le stress à chaque voyage, à chaque fois qu’il passe des frontières nous on ne s’en rend pas compte avec un passeport français non seulement on peut passer quasi toutes les frontières et en cas de problème on peut gueuler y a pas de soucis. Eux ils ont tout intérêt à fermer leur gueule quand cela se passe mal et cela se passe tout le temps mal le fait de voir parce qu’ils sont accompagnés de français d’un coup tout se déverrouille. C’était quand même un peu choquant.
Ce groupe existe depuis 23 ans maintenant. Comment mesurez-vous le parcours exceptionnel de la formation ?
Kevin Codfert. C’est un travail de tous les jours. On mesure par les difficultés. Faire évoluer un groupe ce n’est que des difficultés. Travailler avec des Tunisiens c’est une difficulté pour les raisons qu’à exprimer Morgan. Quand j’ai commencé à produire le groupe il y a quelques années pour le premier album Hope je sous estimai les problèmes qu’on aurait de logistique rien que de faire venir les mecs en Europe c’est galère que leur monnaie ne soit pas convertible qu’ils soient interdits de carte de crédit. La logistique a rendu notre journée, la vie du groupe infiniment plus compliqué que d’autres groupes qui sont 100 % français ou suédois ou ce que tu veux. Un travail de tous les jours, de l’acharnement de la dédication en permanence sans regarder ni devant ni derrière mais au jour le jour en essayant de faire le mieux possible. Personnellement je pense que l’on manque de recul pour te dire comment ça été. Souvent les gens de l’extérieur me dise la montée est fulgurante. Pour nous c’est une pièce de Lego, une petite pièce que l’on met l’une devant l’autre depuis des années.
Comment évaluerais-tu la progression musicale de MYRATH au fil des années ?
Kevin Codfert. L’émulsion elle se nourrit d’abord par le public. Au départ c’est de la musique parce que c’est cool parce que tu es fan de Dream Theater par exemple et puis après tu fais ta propre musique et après les gens découvrent ta musique. Tu t’aperçois en fonction de ce que tu joues, tu as un feedback différent des gens et après tu décides de faire de la musique pour les autres pour toi car finalement la musique c’est un moyen de communication et inconsciemment tu adaptes ta musique et elle évolue en fonction des expériences et des concerts que tu as pu faire le long de ta carrière. Ta musique évolue en fonction des gens, des femmes.
Est-ce que tu te fixes des challenges en tant que batteur en studio ou tout coule de source ?
Morgan Berthet. C’est un peu le labo de recherche quand je rentre en studio, les parties ne sont pas callées à 100%. Je découvre un peu ce que je vais faire sur place parce que j’aime bien travailler comme ça parce que je n’aime pas travailler avant peut être (rires). C’est toujours intéressant, je ne peux pas savoir à l’avance si tout ce que je vais proposer va passer. En l’occurrence là 99% est passé. J’ai eu très peu de choses à refaire après. C’était l’album le plus simple à enregistrer depuis que j’ai rejoint MYRATH. C’était le plus fluide.
Pour conclure que diriez-vous aux gens qui vont découvrir Karma ?
Morgan Berthet. Je pense que c’est le plus large en termes de sous genre de Metal, c’est le plus large qu’on est fait. Il y a des morceaux qui peuvent sonner hard rock à l’ancienne comme des morceaux beaucoup plus moderne que ce que l’on pouvait faire avant mais le panel est extrêmement large. J’ai envie de leur dire si tu n’aimes rien dans cet album c’est que tu n’aimes pas le Metal (rires). Il y en a pour tout le monde ça reste du MYRATH ça reste sonorité orientale. Forcément si tu n’aimes pas ça on ne peut rien pour toi mais il a été fait inconsciemment pour séduire le plus grand nombre je pense.
HardRock Café 5 Mars 2024.
Pascal Beaumont / Photos DR
Pascal Beaumont et Laurent Machabanski (Traduction / Retranscription)