Pour commencer cette interview avec toi GRANT HAUA, aujourd'hui nous aimerions évoquer tes premières années en Nouvelle Zélande. Quels ont été les moments fort de ta jeunesse, l’adolescence, l'école, tes amis et ta famille ?
Grant Haua. J'ai grandi en zone rurale en Nouvelle Zélande, je suis allé dans une petite école de campagne avec environ 80 enfants âgés de 5 à 10 ans, presque tous maoris, c'était cool, on jouait au rugby et au football en hiver, on pêchait et on nageait dans la rivière pendant les longs étés, nous avons beaucoup de plages de sable blanc ici et beaucoup de fruits de mer, mon père était et est toujours un excellent pêcheur, d'ailleurs ce soir c'est poisson frais que j'ai pêché ce week-end ! Je vis sur une terre ancestrale sur laquelle j'ai grandi, mon école est toujours là juste en bas de la route, et beaucoup de mes vieux amis d'école sont toujours là aussi. Quand j'ai eu 11 ans, nous sommes allés à la "grande école" en ville, c'était cool aussi mais d'une manière différente, aujourd'hui les enfants maoris sont en minorité, mais à l'époque il y avait beaucoup plus d'enfants, et j'ai pu rencontrer beaucoup de personnes extérieures à ma région, les Kiwis (néo-zélandais, ndt) sont très branchés sport, je jouais au rugby le week-end, mon père était l'entraîneur de mon équipe. Ma mère entrainait une équipe de netball aussi, donc nos samedis d'hiver c'était du sport et encore du sport, et l'été à la pêche. Aujourd'hui, quand je regarde en arrière, je ne retiens que toutes ces choses que nous faisions en famille, le sport, les amis, la pêche avec papa et mon frère, ma mère qui me donnait de la glace quand j'étais malade... Ces souvenirs sont précieux pour moi et le seront toujours.
Quelles ont été tes premières découvertes musicales, tes premières influences et tes idoles ?
Grant Haua. Michael Jackson dans les premières années, avouons-le, le mec était un grand, plus grand que quiconque. J'ai toujours été fan de la Motown et de musique soul parce que ma mère était une grande fan de Smokey Robinson et de Sam Cooke, et les chanteurs de cette époque sont toujours des références pour moi : Otis Redding, Jackie Wilson, Wilson Picket, ces gars-là savaient chanter. Mon père est aussi un bon chanteur, lui c'était plus les groupes de guitare, Dire Straits en particulier, c'est à partir de ces groupes que j'ai développé un respect pour cet instrument.
Comment t'es venue l'envie d'apprendre à jouer de la guitare et à quel âge a tu commencé à apprendre la guitare ?
Grant Haua. Mon petit frère en a eu une pour Noël quand il avait 11 ans, il est devenu très bon très vite, il a commencé à jouer très jeune, vers 12 ans, pour un groupe de culture maori, et ça m'a vraiment inspiré pour apprendre aussi, d'autant que toutes les filles semblaient aimer ça, donc c'était une incitation supplémentaire ! Du coup, comme j'ai un an de plus que mon frère, j'ai commencé vers 13 ans.
La musique Maorie est perçue ici en Europe comme incantatoire, sacrée, presque religieuse, et dans ce sens peut avoir des points communs avec le Blues : est-ce que ta culture polynesienne t'a naturellement poussé vers le Blues ?
Grant Haua. Je pense que la culture maori m'a poussé vers la musique en général, c'est un peuple très musical, avec une certaine aisance avec le rythme, pour moi le Blues est devenu évident la première fois où j'ai entendu la version de Mary Had A Little Lamb de Stevie Ray Vaughan, le fait que ce soit une comptine vient ajouter un supplément de fraîcheur, le blues a des aspects durs, des chansons qui parlent de pertes, d'amour perdues, mais aussi des chansons d'espoir et de rédemption, c'est l'ancêtre du RocknRoll, c'est pourquoi j'aime le Blues.
La rencontre avec Michael Barker qui allait devenir ton batteur dans votre groupe Swamp Things a été décisive dans ta carrière : ses nombreux contacts dans le milieu du disque t'ont ouvert les portes des festivals en Australie, mais aussi aux Etats-Unis. Ces concerts dans d'autres continents t'ont-t-ils fait prendre conscience que ton talent pouvait être reconnu dans le monde entier ?
Grant Haua. Certainement ! Parfois, nos ventes de CD dépassaient celles des artistes beaucoup plus gros dans ces festivals, ce qui me confortait dans l'idée que nos chansons étaient plutôt bonnes, ma confiance s'est renforcée lentement à partir de ces performances, et m'a confirmé que je tenais la route, même si je suis toujours nerveux en live, je me suis rendu compte au fil des années que c'était plutôt bénéfique.
Autant dans tes chansons que dans ta vie, tu cultives l'art de la simplicité. Pourtant, être perçu de manière positive sans artifices peut se révéler très difficile. Penses-tu que le public te réserve cet accueil car il perçoit ta sincérité ?
Grant Haua. Honnêtement, je ne sais pas, mais je peux dire que les les paroles et la musique des chansons de l'album sont inspirées et motivées par une expérience personnelle, je pense que c'est un facteur parce que c'est le simple récit honnête d'une histoire ou d'une expérience d'un point de vue personnel, peut-être dans ce monde moderne où tout est produit en masse, c'est bien d'entendre à nouveau quelque chose comme ça, mais je panique parfois parce que je mets un peu trop mon cœur dans mon écriture, mais écrire une bonne chanson honnête parfois c'est ce qu'il faut, les grandes chansons d'amour ont toutes cela en commun.
Tu as fait traduire en français tes textes pour les inclure dans le livret du CD. C'est une attention que peu d'artistes ont envers leur public. Pourquoi avoir fait ce choix ?
Grant Haua. J'aurais aimé pouvoir m'en attribuer le mérite, mais je dois remercier mes amis de Dixiefrog pour cela parce que c'était leur idée, et j'en suis venu à réaliser que ces petites choses supplémentaires sont vraiment appréciées par l'acheteur, je suis vraiment heureux de cette décision.
Deux guitaristes invités de marque sont présents sur ton album, tous deux issus de l'écurie Dixie Frog : Neal Black sur Addiction, et Fred Chapellier sur This is the place... Est-il important pour toi de mettre en avant le collectif d'un label, comme une famille, une cohésion musicale ?
Grant Haua. Absolument, nous avons tous nos forces individuelles mais ces forces peuvent être améliorées avec la force des autres, et Fred et Neal sont des mecs forts, et oui, cela ressemble à une famille au label, et j'espère pouvoir aider si nécessaire pour l'avenir les projets que les autres artistes ont, la force vient aussi du nombre, tout comme les gars de Motown, les gars de Stax et les gars de Chess.
Te souviens-tu du tout premier concert que tu as donné ? De la ville et/ou de la salle ?
Grant Haua. Oui, très clairement, mon premier concert a eu lieu dans ma ville natale de Tauranga, j'étais le guitariste, nous avons fait des reprises de Deep Purple, Bad Company, Hendrix, nous étions particulièrement mauvais si je me souviens bien.
Comment procèdes-tu pour écrire tes chansons, entre le moment où vient l'idée d'un texte d'une melodie et celui de l’écrire ?
Grant Haua. Je commence généralement par un riff ou une sorte de crochet, puis j'écris des paroles qui collent à ce groove ou à cette mélodie, plus le groove est rauque plus les paroles suivent, plus le groove est tendre plus les paroles suivent, et inversement, parfois j'ai un sujet en tête et je crée un groove à partir du sujet... Je trouve souvent la majeure partie de mes paroles pendant que je conduis, ça passe le temps et ça me fait arriver plus vite à destination.
Si tu devais te définir, quelle serait ta phrase ou ta devise ?
Grant Haua. Je n'en sais rien mon pote, peut-être un "Blues Balladeer"
Aujourd'hui, quels sont tes groupes préférés ? Sont-ils les mêmes qu'avant ? Quel genre de musique préfères-tu écouter ? Y a-t-il une chanson ou un album qui restera pour toujours ?
Grant Haua. J'adore toujours les grands chanteurs de soul que j'ai mentionnés plus tôt, j'écoute souvent des groupes plus modernes comme Tedeschi Trucks et Alabama Shakes, des jeunes gars comme Marcus King, des groupes de bluegrass chevronnés comme les Steeldrivers, Otis Taylor que j'ai incroyablement seulement récemment découvert, mes goûts de guitare varient énormément, de Ry Cooder à des shredders comme Guthrie Govan, et j'écoute souvent des maîtres comme Oscar Peterson et Ella Fitzgerald en dégustant un bourbon devant YouTube, j'adore regarder de vieilles séquences live de Freddie King et Albert Collins sur YouTube aussi, j'ai trop de groupes préférés, mon époque préférée serait le milieu des années 60 au milieu des années 70.
Qu’est-ce que tu fais lorsque tu ne travailles pas? Quels sont tes passions et tes passe-temps?
Grant Haua. Je pêche et j'adore regarder mes fils jouer au rugby.
Pour finir, si tu devais te rendre sur une île déserte et ne garder que 3 choses : un disque, un film et un troisième choix, quelle serait ta sélection et pourquoi?
Grant Haua. Je n'ai besoin que d'une guitare, de cordes et d'une canne à pêche, je peux faire mes propres disques, et choper un flux, ça fera l'affaire !
Merci a toi de ce moment que tu nous a consacrer si gentiment et a très bientôt sur une scène Française.
Grant Haua. Merci beaucoup et pareil à toi.