mardi 4 mai 2021

EVANESCENCE (Jennifer Majura )// Interview // The Bitter Truth ... 8 Mars 2021.

 

EVANESCENCE c’est l’histoire d’une success story de celle dont tous les groupes rêvent et qui arrive parfois au détour d’un album hors norme. Le gang US de Little Rock sort son premier opus Fallen en 2003 et en vend pas moins de 17 Millions à travers le monde, un rêve éveillé qui les propulse immédiatement sur les scènes du monde entier ! Il s’en suivra un deuxième album The Open Door qui s’écoulera à 5 Millions d’exemplaires. Le gang connaitra par la suite une longue période d’instabilité avec des mouvements incessants de musiciens et devra sa survie à la force et la volonté de sa leader Amy Lee qui ne baissera jamais les bras et maintiendra le navire à flot malgré des turbulences incessantes. 2011 sera l’année de leur résurrection avec l’album éponyme qui se classera numéro 1 dans les charts Us et prouvera à tous que la formation est bel et bien toujours vivante et n’a pas dit son dernier mot. Il faudra attendre ensuite six longues années pour qu’Amy et ses acolytes reviennent sur le devant de la scène avec Synthesis une parenthèse Electro Symphonique ou le groupe reprendra une pléiade de morceaux issus de leurs trois premiers opus en apportant une relecture surprenante mais innovatrice. S’en suivit une tournée mondiale ou EVANESCENCE se verra accompagné d’un orchestre symphonique à cordes et donnera pas moins de 60 concerts, le tout célébrer par un live Synthesis Live en 2018 ! Il marquera aussi l’arrivée de Jennifer Majura Indrasen en tant que guitariste en 2015, qui fera ses premières armes studio sur Synthesis ainsi que sur scène ! 10 ans auront été nécessaires pour que la belle Amy nous revienne avec The Bitter Truth une galette de compositions originales truffées de guitares saturées produite de main de maître par Nick Raskulinecz (RUSH, ALICE IN CHAINS). 2021 sera l’année de leur grand retour au Rock pur et dur teinté d’une Pop envoutante ! Il n’en fallait pas plus pour que votre serviteur soumette à la question la charmante Jennifer afin d’en savoir plus sur son parcours au sein de EVANESCENCE et son implication artistique à travers les morceaux de The Bitter Truth. Un long entretien placé sous le signe de l’humour et de la décontraction avec une guitariste très sympathique spontanée et très loquace n’hésitant pas à prolonger l’interview au-delà de nos espérances visiblement heureuses de participer à cette nouvelle aventure. Magnéto Jennifer c’est à toi !



Quel souvenir en gardes-tu de votre tournée mondiale accompagné d’un orchestre à cordes qui a eu lieu en 2017 et 2018 pour la promotion de l’album Synthesis ?

Jennifer Majura. C’est une tournée qui a été suivi de nombreuses dates, il y a eu en fait quatre tournées majeures. C’était très différent. Normalement tu sautes et tu cours partout, tu transpires mais là on était assis entouré par un très bel orchestre et forcément cela donne au show un aspect différent, une ambiance différente que ce soit au niveau de la musique, du show par lui-même, de la production. Personnellement j’ai adoré être impliqué dans cette expérience unique, on jouait dans des salles faites pour le classique. J’ai déjà joué avec un orchestre classique lorsque j’étais étudiante mais là c’était la réalisation d’un rêve pouvoir jouer live au côté d’un orchestre symphonique. Cela donne une ampleur différente au show lorsque tu as derrière toi une section de cordes, le son n’est pas le même, c’est très beau, c’était assez incroyable. Et puis on n’était pas dans l’esprit orchestre classique accompagnant un groupe de Rock comme l’a fait METALLICA par exemple, ce n’était pas ça ! Notre idée était d’intégrer à l’orchestre un coté électronique, des boucles pour créer quelque chose de nouveau qui n’avait jamais été fait avant. C’était une période très intéressante, personnellement j’ai adoré cette façon de tourner différemment mais j’ai envie de retourner à un format classique de pouvoir courir partout et de transpirer ! [Rires]

Vous avez aussi eu l’opportunité de jouer à Paris au Grand Rex le 28 Mars 2018 !

Jennifer Majura. Oui, je m’en souviens très bien, il a plu des cordes toute la journée, c’était comme un océan qui se déversait dans la rue. Lorsque nous sommes arrivés devant la salle, il y avait quelques fans, ils étaient trempés, il pleuvait si fort, on s’est dit que les gens allaient être trempés et la salle très humide. C’est quelque chose dont je me souviens très bien, il pleuvait à torrents, c’était fou. Mais le concert a été très beau, on adore nos fans Français, on a hâte de revenir jouer ici et partout ailleurs.

Vous avez donné quelques concerts en streaming comme cette session au Rock Falcon Studio le 5 Décembre 2020, quel a été ton ressenti lors de ces shows sans public ?

Jennifer Majura. Ce n’était pas seulement sans public dans mon cas car j’étais confiné chez moi en Allemagne. J’ai été joué dans le studio d’un ami à moi, au même endroit ou j’ai enregistré mon album solo Inzenity (Ndr : paru en 2017) c’est là que j’ai joué live en streaming. Le moment où tu mets ton casque sur les oreilles, que tu fermes les yeux, que tu entends la batterie, le piano, la voix et que tu entends les autres jouer, qu’ils apprécient ce concert, tu es totalement Rock, c’est assez facile d’être tous ensemble en train de jouer. Et quand tu ouvres les yeux tu t’aperçois que tu es seule dans cette pièce en studio ! [Rires] Mais c’est vraiment bien de nos jours d’avoir cette technologie qui nous permet de se connecter ensemble et de pouvoir jouer grâce à l’image et d’offrir un concert à nos fans. Mais tu ne peux pas ressentir cette énergie qui se dégage lors d’un vrai concert live avec un public face à toi, les fans te transmettent tant d’énergie lorsque tu es sur scène et que tu joues pour eux. Chacun s’envoie de l’énergie c’est un échange. Tu ne peux pas retrouver cela lorsque tu joues à travers un écran, ce n’est pas la même chose. J’ai vraiment ressenti cela d’une manière très forte en jouant en streaming, ce qui est important c’est d’être en connexion avec les fans. Le dernier concert que j’ai donné avec Amy et le reste du combo c’était à la fin du mois de septembre, ça fait déjà très longtemps.

Te souviens-tu du premier concert que tu as donné avec EVANESCENCE ?

Jennifer Majura. Oh mon dieu oui je n’oublierai jamais ce concert c’était à Nashville à l’American Music World. On y était allé pour répéter ensemble et c’est la première fois que je rencontrais Amy et les garçons et que nous allions jouer ensemble. On a répété à peu prêt pendant une semaine, j’étais très nerveuse, c’est certainement le moment où j’ai eu le plus de track sur scène, c’était horrible, je n’étais pas moi-même. Lorsque tu remplaces quelqu’un qui était dans le groupe depuis si longtemps comme Terry (Ndr : Terry Balsamo a quitté le groupe le 7 août 2015) qui a composé tant de bons riffs, je le respecte énormément ….. Remplacer quelqu’un c’est toujours difficile car tu ne sais pas ce qui peut arriver avec les fans s’ils vont t’aimer ou the haïr ? Mais ma peur a disparu dès les deux premiers accords du morceau d’ouverture, j’ai tellement été bien accueilli. , ils sont tellement adorables, passionnés, accueillant et fou aussi. Le show à l’American Music World a été le premier et je ne l’oublierai pas. Lorsque tu as des fans qui sont adorables et qui t’apprécient, ça ne peut pas être compliqué et tout se passe bien. J’ai joué dans d’autres formations avant EVANESCENCE, cela fait 13 ans que je joue donc ce n’était pas ma première expérience de ce genre. Mais lorsque tu as la chance de rejoindre un groupe de cette importance qui correspond à ton style, c’est un nouveau monde à découvrir et à gagner, c’est la cerise sur le gâteau, c’est excitant, c’est très beau aussi. Il y a tant de choses qui arrivent, tu rencontres tant de gens merveilleux, voyager, découvrir de nouveaux pays, de nouvelles villes. On a joué dans des salles d’opéra, au Japon, en Amériques du Sud, tout ça c’est totalement existant et très beau en même temps et je suis très reconnaissante de pouvoir vivre cette expérience avec EVANESCENCE.

Quel a été ton implication dans le processus de composition de The Bitter Truth ?

Jennifer Majura. On est tous d’accord pour penser que l’année 2020 n’a pas été la meilleure que l’on ait vécu [Rires] ! Ecrire, produire et enregistrer un album…. C’est mon premier opus original avec EVANESCENCE, ce n’était pas ce que je pensais faire au départ. Nous avons composé pendant toute l’année 2020, je me souviens avoir donné mon dernier concert avec le groupe en Janvier 2020 à Los Angeles. Ensuite nous avons travaillé en studio à Nashville. On a enregistré tout d’abord les premières versions de quatre nouveaux titres, ça nous a rendus très heureux de le faire. Ensuite tout le monde s’est retrouvé à l’aéroport, on s’est dit au revoir et on s’est donné rendez-vous le mois prochain. Puis le Covid 19 est arrivé. Lorsque je suis parti de Nashville pour revenir en Europe, je ne savais pas que je n’allais pas revoir les autres membres de la formation pendant le reste de l’année et que je n’allais plus pouvoir quitter mon pays. A partir de ce moment-là le processus d’écriture a été différent. Nous ne pouvions plus nous rencontrer pour travailler, ce n’était pas possible et pour écrire il fallait que l’on se retrouve tous ensemble. Les autres musiciens du combo qui vivaient aux Etats Unis avaient cette possibilité de se retrouver tous ensemble. Mais pour moi c’était juste impossible, ils m’ont donc envoyé les morceaux sur lesquels ils travaillaient et j’ai à mon tour travaillé dessus en ajoutant mes parties de guitares. J’ai enregistré chez moi en Allemagne, j’ai tout fait moi-même. Mais il me manquait le retour des autres, ça aide beaucoup. Lorsque j’étais en studio avec Amy elle me donnait des indications comme : « Oh j’aime cela essaie encore ». Mick me disait : « Ok essaie encore ça ou donne-moi plus de ça ». Là je n’avais pas de retour immédiat, spontané, je devais me faire ma propre opinion seule. Est-ce que c’est assez bon ? Je vais refaire une autre version et réenregistrer encore ! J’ai fait 2000 prises pour chaque titre et à un moment j’ai dû m’arrêter en me disant ok c’est bon je vais envoyer mes prises car on me les avait demandés. C’était très difficile de ne pas être là physiquement, de ne pas vivre le moment. C’était très difficile car personne ne s’attendait à ce qui nous arrivait, à cette foutue pandémie.

Finalement as-tu enregistré certaines parties en studio avec Nick Raskulinecz ?

Jennifer Majura. On a juste enregistré ces quatre morceaux à Nashville avant la pandémie. Nick est quelqu’un de fabuleux pas seulement du point de vue humain mais c’est aussi ce type de producteur qui a une certaine énergie, il sait de quoi a besoin un morceau avant même que tu l’ais enregistré et joué, c’est un visionnaire. On était tous ensemble dans la même pièce, tout le monde jouait les morceaux, il était avec nous, il était très enthousiaste. Par exemple sur une partie de batterie il te disait : « Yeah c’est incroyable, donne-moi encore de ça » ! C’était très marrant d’enregistrer avec lui. Ce type a travaillé avec des artistes incroyables, KORN, les FOO FIGHTERS, TOOL. Et on a eu la chance de travailler avec lui. Il n’a pas toujours été à nos côtés mais pour moi cela a été une nouvelle expérience très existante.

Est-ce qu’il y a des titres qui ont été un défi pour toi à enregistrer ?

Jennifer Majura. Oui mais ma réponse va être très différente de ce que tu attends. Mon plus grand challenge a été d’enregistrer toutes les parties de lead parce que j’étais seuls assis dans mon home studio en Allemagne. On m’envoyait les morceaux, je les écoutais. Je me souviens les avoir écoutés 2,3 ou 4 fois un soir et je n’avais pas ce feeling que ces titres demandaient au niveau des guitares, je n’avais pas le sentiment qu’ils avaient besoin de plus de guitares. La façon dont Amy et les garçons les ont enregistrés était parfaite pour moi. J’ai écrit à Amy pour lui demander ce que je devais faire maintenant. Je ne ressentais pas le besoin de rajouter plus de guitares sur ces chansons. Bien sûr c’est différent en concert lorsqu’Amy et nous pourront jouer ensemble mais là je ne voulais pas rajouter de guitare juste pour me montrer sur ces titres. Je me demandais ce que nous allions faire, j’ai donc travaillé sur les chœurs c’est quelque chose qui me rend très fière car c’est le premier album dans l’histoire d’EVANESCENCE où il y a des voix féminines en plus de celle d’Amy bien sûr. C’est quelque chose qui me rend vraiment très fière.

Est qu’il y a des titres dont tu te sens plus proche, qui te touche plus personnellement notamment au niveau des textes ?

Jennifer Majura. J’aime beaucoup la manière dont tu abordes le sujet à travers ta question parce que d’habitude on me demande quel est ton morceau préféré. Et je ne peux pas répondre à cette question parce que je suis si fière de tous ces morceaux que nous avons écrits ensemble. Mais la manière dont tu me le demandes : est ce qu’il y a une chanson qui me touche personnellement : je répondrais oui c’est "Broken Pieces Shine" les paroles traitent d’un thème très personnel et émotionnel. Bien sûr toutes les chansons sont incroyables mais celui-là aborde le sujet de personnes qui souffrent de pathologie mentale importantes. Nous avons tous des troubles à différent niveaux, l’anxiété et tout ce qui va avec. Le message à travers "Broken Pieces Shine" est pour moi magnifique. On est tous vulnérable, on est tous faible parfois, tous plus humain mais arrêtons d’y penser, de faire des fixations là-dessus. Si tu as une amie qui ne réalise pas ce que tu ressens tu peux lui faire comprendre à travers cette chanson. Amy au niveau de l’écriture de textes est une des meilleures, elle a un talent incroyable, elle réussit à faire passer de l’émotion à travers des mots, des phrases. C’est toujours le plus difficile pour elle, écrire les textes mais à la fin lorsque tu t’attaches aux textes que tu les lis, que tu les écoutes avec la musique mélodique qui est magnifique c’est juste incroyable. "Broken Pieces Shine" est le titre qui me touche le plus personnellement.

Vous avez sorti cinq singles, The Game Is Over, Use My Voice, Yeah Right, Wasted On You et Better Without You quel a été ton rôle dans le choix de ces morceaux ?

Jennifer Majura. Tout d’abord je voudrais préciser qu’auparavant on abordait la musique différemment. Je suis issue d’une génération qui achetais des Cd et qui écoutait l’album en entier et qui appréciait tous les morceaux dans son ensemble. Mais aujourd’hui le monde s’intéresse juste aux chansons plutôt que l’opus dans son entier. Je ne parle pas de nos Die Hard fans qui nous suivent depuis longtemps et qui je le sais s’intéressent à l’album dans son entier. Mais aujourd’hui la manière dont les gens s’intéressent à la musique à travers le streaming est basé sur les singles. Le moment où tu sors un single peut avoir un rôle important, il peut être lié aux évènements, quand tu vois ce qui arrive aux Etats Unis au niveau politique. Amy a une personnalité très forte, c’est une femme très forte, une musicienne qui exprime ce qu’elle pense et qui utilise son talent pour intéresser les gens et les faire réagir sur des bons thèmes. Ce titre est un morceau très spécifique mais te dire comment ont choisi les singles je demanderai à ma boss car je ne suis par chargée de ça ! [Rires]

Est-ce qu’il y a des thèmes abordés par Amy qui t’intéressent plus que d’autres ?

Jennifer Majura. Si tu écoutes l’album comme une pièce musicale artistique, la chose qui apparait et qui est très clair, c’est que les thèmes abordés parlent de ce qui arrive à notre monde, mais je ne parle pas de politique. C’est inspirant et c’est intéressant, ce qui arrive avec la pandémie le montre bien nous ne contrôlons pas tout, nous ne sommes pas maitres de notre destin. Il faut se lever et réagir pour les combats qui sont justes et encourager les changements dans un sens plus humain pour notre planète. On ressent cette lutte qui se passe et qui va arriver, cette émotion qui fait qu’il faut que nous soyons tous ensemble. Je suis en Allemagne et il y a ce qui arrive aux Etats Unis, on est tous ensemble. Il faut encourager les gens à réagir, ce sentiment tu le retrouves à travers tous les titres, c’est un message d’espérance et de puissance. C’est un opus qui probablement et je l’espère aura un impact pour changer ce monde et le rendre meilleur. Il montre qu’il faut prendre soin de la race humaine.



Tu as rejoint EVANESCENCE en aout 2015 que penses-tu leur avoir apporté ?

Jennifer Majura. Chaque membre du groupe à ses propres gouts musicaux, son histoire musicale, son passé, son expérience, cet assemblage qui fait EVANESCENCE. Chacun apporte sa touche personnelle, c’est un peu comme un plat, j’ai apporté le Chili con carne ce côté épicé, Amy apporte la soupe, je ne sais pas, Will le barbecue, chacun à sa personnalité et la combinaison de tous ces apports individuels crée le son de l’album. Chacun apporte sa petite part à l’édifice. Amy apporte beaucoup c’est clair car c’est la leader de la formation, c’est magnifique et elle sait exactement ce qu’elle veut. Je reste toujours derrière elle quelque soit sa décision. C’est juste une combinaison de différentes saveurs, c’est ce qui rend le plat si bon. Moi en tant que guitariste j’ai toujours été attiré par le Heavy Metal, SONS OF APOLLO, DREAM THEATER. D’autres sont plus attirés par la Pop Electro, d’autres le Death Metal. Tous ces différents gouts musicaux nous influencent au niveau de la manière dont on joue et de la vibe qui se dégage, c’est ce qui donne le son de l’opus.

Tu es aussi une grande fan d’AC/DC, tu as débuté avec un groupe de reprises des boys, les BLACK THUNDER LADIES !

Jennifer Majura. [Rires] ! C’est un grand retour dans mon passé, une autre vie. Oui c’est vrai c’est là que j’ai appris à tourner, la vie sur la route. On était des filles, on partait sur les routes avec nos voitures, on conduisait des heures avec tout le matériel entassé à l’arrière, on arrivait, on faisait le soundcheck, puis on montait sur scène, on donnait notre concert, on transpirait et on reprenait notre voiture pour conduire vingt heures de suite afin de rentrer à la maison. C’est avec ce combo que j’ai fait mes premiers pas, j’ai appris à jouer sur scène et à tourner ! [Rires]

Il y a deux reprises sur « The Chain » de Fleetwood Mac et « Cruel Summer » de Bananarama qu’est ce qui a motivé le choix de ces deux morceaux ?

Jennifer Majura. J’ai toujours apprécié de faire des reprises et le groupe aussi. Je me souviens d’Amy au piano en train de reprendre « I Wanna Dance With Somebody » de Whitney Houston, ma reprise favorite étant celle de Michael Jackson « Dirty Diana ». Je pense que c’est bien de reprendre différents styles et apprécier la musique que d’autres ont écrit et leur donner notre propre saveur. A chaque fois tu apprends quelque chose, ce n’est jamais un retour en arrière, reprendre un titre de quelqu’un d’autre fonctionne et te permet d’y apporter ta touche personnelle. Tout le groupe adore Fleetwood Mac et avait envie de reprendre ce morceau. Oh mon dieu Fleetwood Mac et on était tous d’accord, c’est un grand morceau qui est reconnu et établi, il est juste incroyable, il a sa touche personnelle. C’était un énorme challenge de le reprendre, on a travaillé au studio de Nashville avec un orchestre. C’était ma toute première expérience, me retrouver avec un orchestre symphonique dans la même pièce, c’était incroyable, c’était si beau. Au moment où ils ont commencé à jouer, tu es juste éblouie, tu ne peux plus bouger, c’est tellement incroyable et beau. Une autre expérience qui a vraiment été bien, je leur en suis reconnaissante. Je remercie tout le monde pour cela, me retrouver dans la même pièce avec ce fabuleux orchestre, toutes ces cordes, c’est quelque chose de très spécial. Il y a beaucoup de moments uniques comme ça que je garde en mémoire depuis que j’ai rejoint le combo et j’espère vivre encore beaucoup de moments uniques comme celui-là.

Tu es une grande fan de Steve Vai, que représente-t-il musicalement pour toi ?

Jennifer Majura. J’ai fait un podcast avec des amis sur l’album de Steve Vai « Sex & Religion » qui est mon album favori de tous les temps. Si tu m’interroges sur Steve Vai on est reparti pour trois heures de plus [Rires]. Steve Vai est l’inspiration ultime non seulement pour les guitaristes mais la façon dont il ressent la musique et la façon dont il créée de l’art. C’est inspirant et beau. Sur l’album « Passion & Warfare », cette guitare parle et paraît comme humaine : c’est une chose vivante. Je n’ai jamais eu ce genre d’expérience avec d’autres guitaristes. Steve n’est pas seulement un fabuleux être humain. Il est si sage et inspirant avec tout ce qu’il fait et je l’apprécie vraiment. En fait je lui ai envoyé un email car nous sommes passés sur une chaine de télévision américaine pour lui dire que j’allais jouer avec la nouvelle guitare Ibanez Pia. Je lui ai dit de regarder et que j’adorai cette guitare. Il m’a remercié en allant vérifier et regarder tout de suite [Rires]. Steve Vai est juste phénoménal.

Comment s’est déroulée ta rencontre en 2016 avec ton idole ?

Jennifer Majura. J’étais dans un état de nervosité. Je lui ai fait un câlin car je ne pouvais pas m’en empêcher pour tout ce qu’il a fait. Pour mon premier concert de Steve Vai j'étais avec mon père je devais avoir entre huit ou neuf ans. Je me souviens car j’étais au premier rang et il jouait. J’ai du toucher ses jambes ou ses chaussures [Rires]. Je l’admire car je suis avant tout une pure fan de son travail et de sa musique. Ça m’a fait plaisir de le rencontrer. Toi aussi tu joues d’un instrument de musique ?
Non pas vraiment mais tout a débuté pour moi avec SLADE et leur best of Sladest ca été une révélation, le déclic puis j'ai découvert d'autres combos comme DEEP PURPLE, RAINBOW, AC/DC, KISS et bien d'autres par la suite !
Jennifer Majura. Sérieusement SLADE le groupe britannique, avec le chanteur Noddy Holder. Je dois te raconter une histoire à propos de SLADE. Mon père était bassiste et il a été invité à ce show TV pour tourner avec son groupe. Ils ont été invités et SLADE était présent aussi. Je me rappelle que j’avais une fleur que je voulais donner à mon père après leur performance. J’avais six ans et j’ai demandé à ma mère si je devais l’offrir à mon père ou à quelqu’un d’autre. Elle m’a demandé à qui d’autre veux tu l’offrir ? J’ai répondu au guitariste de SLADE et c’est drôle. C’est certainement pour cette raison qu’en premier lieu j’ai commencé la guitare. Son nom était Steve Makin. Je tremblotais et j’étais nerveuse. Je lui ai offert les fleurs et c’est devenu mon premier professeur de guitare car nous nous écrivions des lettres. Il avait une guitare rose et je voulais aussi la même. C’est la première partie de mon histoire. C’est si cool.

Tu as eu la chance de rencontrer énormément de musiciens. Est ce que c'est la réalisation de rêves que tu avais en débutant la guitare !

Jennifer Majura. Oui [Rires]. Parfois je regarde mes contacts dans mon Smartphone et je me demande pourquoi j’ai tous ces gens extraordinaires dans mes contacts. Que s’est il passé dans ma vie ? C’est si surréaliste. Ritchie Kotzen était mon guitar hero lorsque j’apprenais la guitare et maintenant je vais faire un show sur la cuisine avec sa femme. Ritchie était un sujet important. Il y avait aussi Billy Sheenan. Nous avons travaillé ensemble mais j’étais une gosse et je n’osais même pas lui parler. Toutes ces personnalités, la liste est interminable comme Gus G, Jeff Waters, Jeff Loomis qui sont devenus mes amis, de vrais amis. Cela me fascine. Si je n’étais personne dans le sens ou je suis dans le groupe dans lequel je joue actuellement, je ne suis pas si sûre que les choses se seraient déroulées de cette manière. Mais je suis toujours la même. Ce n’est pas la même chose quand Andy James de Five Finger Death Punch t’adresse une composition. C’est différent. Je continue à regarder les contacts dans mon agenda. C’est ce qui se passe et là ça devient vite l’enfer.


Finalement comment as-tu rejoint EVANESCENCE en 2015 ?

Jennifer Majura. C’est une bonne histoire. Je jouais de la basse dans un groupe de metal ( Ndr:EQUILIBRIUM) et je n’étais pas très heureuse dans ce groupe car je suis une guitariste. Nous devions jouer dans deux festivals en Allemagne et un autre en république tchèque. Le même jour Testament était de la partie. Alex Skolnick est un musicien fabuleux et j’ai personnellement beaucoup de respect pour lui car c’est l’un des rares a être accepté dans la communauté du metal et aussi dans la communauté du jazz. Quand il fait les tournées avec Alex Skolnik Trio c’est un fabuleux guitariste de jazz et il m’a demandé si je jouais de la guitare dans ce groupe. Je lui ai répondu non et m’a demandé pourquoi. Tu es une guitariste [Rires]. Quelques semaines plus tard j’ai reçu un mail de sa part en disant que ses amis allaient rentrer en contact avec moi. Je ne peux pas en dire plus mais c’est quelque chose que tu ne peux refuser. Il faut dire oui. Quelque chose de très mystérieux allait se passer pour recevoir un mail de qui. Une semaine plus tard j’ai reçu le mail d’Amy que j’ai rejoint en avion à New York. C’est Alex qui a déposé mon nom. Grâce à ce festival où je jouais de la basse dans un groupe de Metal. Il y a toujours une part de chance. Tu dois toujours être au bon endroit au bon moment définitivement. En 2020 certains diront c'est ton troisième album. Je suis en train d'écrire mais ce n’est pas aussi efficace que je le voudrais. Ma vie durant ces trois dernières années en particulier était entre les hôtels, les aéroports et les tournées en bus, voyager et décalage horaire, valises, lessive [Rires], aéroport et ainsi de suite. C'est toute ma vie.  Après 2020 cette année « superbe », le reste du temps je passai ma vie sur un canapé. Où allais-je trouvé l'inspiration ? Qu’est ce que je devais écrire comme sujet : le blues du canapé [Rires]. Je lutte et je ne veux pas me forcer à écrire car l'inspiration viendra. Tu ne peux pas forcer l'inspiration. Ce sera un troisième album solo mais je ne sais pas quand.

Est ce que tu penses que la pandémie va te donner plus de temps pour écrire un nouvel album solo ?

Jennifer Majura. Oui mais c'est le piège. J’ai discuté avec des guitaristes célèbres. Ces musiciens ont la même problématique. Tu as du temps mais aucune matière dans ta vie. Rien ne se passe et tu ne ressens aucune énergie et pas d'inspiration comme je l'ai dit. La seule chose que j'ai vu c'est mon appartement et mon canapé, la cuisine, faire des repas et manger trop. Je commence à devenir joufflue. C'est dur d’être inspirée à ce niveau. Tu aimerais écrire. Avec tout ce temps j’aurais dû jouer plus de guitares. C’est juste une énergie bizarre avec toute cette pandémie. Toute cette incertitude, tout est imprévisible et personnellement je ne suis pas à me dire que j’ai tant de choses à dire maintenant. Rien, non vraiment rien. Si j’ai quelque chose à dire j’enregistre pour collecter des informations et des idées.

Tu donne régulièrement des cours de guitares est ce quelque chose que tu apprécies et qu’essaye-tu de transmettre à tes élèves ?

Jennifer Majura. Oui je vais retourner à mon école de musique demain pour enseigner avec mes élèves.  La plus belle expérience c’est quand tu reviens d’une tournée tous les jours avec 25000 personnes hurlant ton nom et tu reviens dans ton école de musique. Il y a une petite fille de dix ans qui ne peut pas jouer une corde. C’est bon et c’est la base. C’est à l’opposé de la vie de star. C’est quelque chose dont j’ai besoin, de ressentir l’humain et de se sentir normal. J’adore enseigner et j’adore partager les émotions. C’est ce que la musique devrait être : créer et partager un moment. La musique ensemble est belle. La musique n’est pas quelque chose de mécanique. La musique devient de l’art quand tu fermes les yeux, un peu comme Steve Vai, tu écoutes et tu as une vision. Tu as des frissons, de l’émotion, tu pleures, tu ris. Si la musique canalise au niveau de l’auditeur, c’est le but de la musique et on appelle cela de l’art. Tout le monde peut ressentir des émotions.  Tu n’as pas besoin de parler un certain langage pour ressentir la musique. C’est ce que j’adore enseigner le plus. La musique c’est de l’émotion.

Qu’est ce qui t’as motivé à enregistrer aussi des albums solos ?

Jennifer Majura. Juste parce que je fais partie d’un groupe cela ne signifie pas et ne t’oblige pas nécessairement à écrire des choses qui sonnent comme ton groupe. C’est intéressant quant tu apportes tes propres vibrations à un groupe et de pouvoir créer quelque chose de plus grand pour la formation. Au niveau des albums solos tu ne fais aucun compromis. Je l’ai fait sur « Inzenity ». C’est tout à fait et uniquement moi.  Tout ce qu’il y a sur cet opus sonne exactement comme je le voulais dans l’art du travail. Tout. C’est une approche complètement différente si tu travailles dans un combo ou si tu travailles tout seul et que tu veux tout contrôler. L’approche est différente.

A propos d’Eddie Van Halen qui nous a quitté l’année dernière,que représente-t-il pour toi ?

Jennifer Majura. Encore une histoire sympathique [Rires]. Nous avons joué au Greek Theater à Los Angeles. Il y avait cette rumeur qu’Eddie Van Halen allait être au centre de ce show. Nous avons joué. Troy (Ndr : Troy McLawhorn Guitariste) est un fan d’Eddie Van Halen et il était si nerveux. J’étais aussi nerveuse. Tout le monde se demandait si cela allait arriver. Est-ce qu’il va venir nous voir jouer sur scène, oh mon dieu ! Sur cette tournée j’ai rejoint un groupe pour un show acoustique pour jouer le titre « Kashmir ».  J’étais sur le point d’entrée sur scène la guitare à l’épaule pour jouer. La chanson avait déjà commencé et j’ai regardé de la tête aux pieds et devant moi il y avait Eddie Van Halen dans le vestiaire. Je suis arrivé près de lui et je lui ai dit de bien vouloir me signer un autographe sur le dos de ma guitare. Il a signé et je lui ai répondu que je devais jouer maintenant. Donc c’est ma première rencontre avec Eddie Van Halen. Plus tard Amy m’a rapporté ce qu’il avait dit sur moi [Rires]. J’étais gênée. Il est si important pour le développement de la musique en général pas seulement en tant que guitariste. Il a toujours su évoluer dans les styles de musique, les musiciens, dans sa vie. C’est la plus triste perte.  Lorsque j’ai appris son décès par Courtney Cox du groupe The Iron Maidens, elle m’a envoyé un texto et j’ai immédiatement pleuré.  Cette nuit là j’ai appelé Jeff Waters car il est dingue d’Eddie Van Halen et nous pleurions tous les deux. Pour tout le monde c’est une perte horrible.

Pourquoi avoir choisi la guitare ?

Jennifer Majura.
Quand je t’ai parlé de l’histoire de SLADE et pourquoi je voulais avoir une guitare rose, tout est parti de là. Mais rapidement j’ai découvert d’autres groupes. Quand j’étais gamine j’adorai BON JOVI. Richie Sambora était mon héros. Une fois que j’ai pu jouer toutes les chansons de BON JOVI, je me suis demandé quelle serait la prochaine étape. Ensuite il y a eu les gars comme Steve Vai, Nuno Bettencourt et plus tard Greg Howe. Il y a tellement de guitaristes dans ce monde qui sont si inspirants. C’est comme ça que je suis entré dans le monde profond des guitaristes. En revanche ce n’était pas le cas de l’Allemagne avec l’euro dance. Tout le monde écoutait ces merdes comme les Boys band ou le top 50. J’étais folle.  Écoutez donc Steve Vai ! Alors je n’avais pas beaucoup d’amis. C’est comme ça que j’ai appris ma passion pour cet instrument la guitare quand tous les autres allaient boire un café ou allaient faire du shopping. Je refusai de les rejoindre car je devais jouer de la guitare. C’est la première chose que j’ai faite en revenant de l’école, la dernière chose que je faisais avant de me coucher tous les jours.

Quelle est l’idée qui se cache derrière la pochette de The Bitter Truth ?

Jennifer Majura.
De ma compréhension le titre « The Bitter Truth » représente le fait d’arrêter de tricher, d’imiter, de nier et d’arrêter de prétendre. C’est ta propre et dure réalité. Chaque être humain même si c’est dur à avaler, même si tu as des cicatrices, des douleurs tu n’es pas parfait. Tu dois te connaître comme un être un réel humain au lieu de t’inventer une vie sur Instagram et de croire si durement que tu es parfait alors que tu as du mal à y croire toi-même. C’est le thème de l’album. Malgré la dure réalité, tu dois voir le véritable être humain qui est en toi. L’apprécier et commencer à t’aimer toi-même pour la personne que tu es vraiment. C’est ce qui te fait avancer et c’est ce qui fait que tu es toi même. Même si la réalité est rude et difficile à avaler. Sois vrai.  C’est le message à faire passer à travers l’album.

Aimerais tu faire une reprise d’AC/DC avec EVANESCENCE ?

Jennifer Majura. Peut être pour jouer avec les garçons [Rires]. Je ne crois pas. Chaque fois que nous devons faire des reprises, c’est toujours un musicien ou un artiste que nous respectons vraiment comme Fleetwood Mac. Tout le monde dans le groupe en est dingue. Et Michael Jackson. Comment ne pas aimer ce qu’il a créé. Il y aura probablement plus de reprises à l’avenir mais il n’y a pas encore de conversation sur ce sujet.
 

8 mars 2021.
Pascal Beaumont  
Pascal Beaumont et Laurent Machabanski (Traduction / Retranscription)