Du Havre à la Légende - Partie 2
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De "Vacant Heart" à "Too Young To Love me" en passant par la tournée solo avec
Joël Drouin, "Rendez vous in Angel City" parle nous de ces diverses expériences.
A
partir de 1980, on a tourné avec Little Bob Story puis j'ai splité le
groupe et à ce moment là j'avais vu jouer Gillou avec son groupe et je
me suis dit "Tiens, il a une belle allure, il joue pas mal". Et Nico Garotin qui
était roadie de Mino Quertier, je l'ai vu jouer, faire ses solos de batterie. Il
était tout jeune, i avait 19 ans. J'étais un peu leur père. Après j'ai
gardé François Gehin. On avait pas de guitariste solo car Gillou était plutôt
riffeur et rythmique. Il me faisait également des solos et se
débrouillait bien. Et j'avais demandé à Jean-Louis, qui était un
guitariste de Paris, de rester ou de partir car je souhaitais continuer
la story. Et là il me dit "Mais non Bob, ils sont trop jeunes !". Il y
croyait pas. Après il a regretté car il m'a appelé plusieurs fois pour
revenir mais c'était trop tard. Donc là je n'avais pas de guitariste. On
a commencé à écrire les morceaux de "Vacant Heart" avec Gillou, François et Nico.
On a répété puis je suis allé à Londres rencontrer Sean Tyla. Je lui ai
demandé s'il était d'accord pour produire l'album. Il m'a répondu "Oui
et si tu as besoin d'un guitariste, j'ai mon jeune guitariste solo à moi
qui peut t'aider pour certains trucs. Et donc on est allé à Londres
pendant 1 mois. C'était génial. On a passé un super moment à
enregistrer. Vacant Heart avant un bon son et un très bon ingénieur du son. Et là
il y avait une boîte de disques qui nous voulait. Mais depuis "Come See
Me", comme ils voulaient pas nous vendre à l'époque de "Living in the
Fast Lane" en 1977, j'ai obligé Crypto à nous vendre à RCA. Ils leur
devaient tellement de blé qu'ils m'ont vendu comme un joueur de foot. Et
RCA nous a bien accueilli. Évidemment puisque c'est eux qui
distribuaient l'album. Donc ils ont vu combien on en avait vendus et on a
signé avec eux pour 4 albums. Mais il fallait qu'on se barre. On voyait
bien que ça traînait. Donc on a apporté nos maquettes chez EMI.
Téléphone était parti chez Virgin. Alors ils nous ont pris car ils
croyaient qu'ils allaient pouvoir vendre un max et on a fait ça avec Thom Panunzio
comme ingénieur du son au studio de Boulogne Billancourt où les
Pretenders avaient enregistré leurs premiers disques. Il y a même les
Stones qui étaient venus enregistrer là. Puis j'ai fini l'album a New
York avec Kenny Margolis qui était venu faire du piano et les cuivres les Ashbury Jukes qu'on avait
rajoutés, ceux de Southside Johnny sur "Too Young to Love Me". C'était
vraiment une belle aventure et ce groupe a duré, après, jusqu'à
"Ringolevio". Quand j'écoute encore l'album Live de la Cigale qui n'est
jamais sorti avec ce groupe, on avait pris Mickey à l'Harmonica pour
avoir un mec en plus, je me dis que c'était une tuerie tellement ça
jouait bien, tellement ça donnait. Et puis après j'avais rencontré Mimi
avant d'aller enregistrer. Entre-deux j'avais fait des expériences avec
Joel Drouin Pianiste de Jazz. Au départ je me suis dit "Mais qu'est-ce que je
vais foutre avec un pianiste de Jazz ?". Et en fait j'ai chanté du Tom
Waits, mes ballades à moi dans le style bluesy et quelques blues. On a
jamais enregistré mais les gens adoraient. Et on a fait 150 concerts
comme ça entre deux tournées avec Little Bob Story. Et en fait Jean Louis Le
guitariste a regretté après car il a vu que, de toutes façons moi
lorsque je veux faire quelque chose, je le fais. Et le groupe avec les
jeunes musiciens est devenu très bon aussi. Puis on a récupéré
Guy-Georges Gremy de nouveau. Et là c'était "Too Young to Love Me".
C'était d'enfer ! Malheureusement, après, il a recommencé à picoler
donc... on avait fait "Cover Girl" le 45 tours et on avait rencontré Yves Chouard qui
jouait avec Balavoine qui était décédé à ce moment là. Il avait joué 1
an avec Renaud. Le public de Little Bob Story n'a jamais adhéré à Yves Chouard.
C'était un très bon guitariste et un très bon compositeur car c'est avec
lui que j'avais écrit les chansons de "Ringolevio" qui est un super
album. Et puis après ça et après le Live on était allés à Londres puis à
Madagascar et aussi en Russie à Saint Pétersbourg. Il y avait cette
saloperie de Poutine qui était maire. Et puis, après, ça m'avait changé
la manière de voir les choses, de jouer avec le piano car au départ,
j'étais pas sûr. Mais après j'entendais ma voix autrement qu'entouré de
batteries et d'amplis à fond. Je voulais des nuances dans mes morceaux
et ils ne me les donnaient pas toujours donc j'ai arrêté le groupe. J'ai
été malade 3 mois à cette époque. Puis je suis allé enregistrer "Rendez vous in Angel City" à
Los Angeles avec que des musiciens américains. Il y avait Kenny Margolis aux
claviers. Jeff Eyrich, le producteur qui a enregistré l'album m'a dit "J'ai
Steve Hunter à la guitare, ça te dit ?". Je le connaissais par Mitch
Ryder, Lou Reed et Alice Cooper. C'était un génie ce mec. Je lui ai
répondu "Bah, oui évidemment !".
Je
voulais Ry Cooder mais c'était pas possible. Il n'était pas libre.
J'avais bon goût quand même ! Donc il m'a emmené, dans un bar, voir Chuck E Weiss
qui faisait des concerts assez régulièrement et qui est décédé il y a
pas très longtemps et avec lequel j'ai fais le boeuf ce soir là. Il y
avait JJ Holiday qui était là et qui jouait les guitares slide. Donc il a
remplacé Ry Cooder et jouait très bien. C'est devenu un ami. Et puis il y
avait aussi Little Man qui était au saxo et qui a joué sur "Lost Territories".
Lui aussi décédé à cause de la dope. Mon nouveau batteur avec lequel on
a répété une semaine, au bout de 2 jours j'ai dit "il fait pas le taf
!". C'était le batteur de X le groupe punk new yorkais. Lui, il était
tout content. Il m'a dit "On va aller jouer avec toi en France !". Je
lui ai répondu "Attends, c'est pas sûr !". J'ai dit à Jeff Eyrich "Lui il fait
pas le taf, cherches-moi un autre batteur !". Il voulait le batteur des
Cruzados qui a joué avec nous après mais il n'était pas libre car il y avait
aussi Tony Marsico à la basse qui jouait dans les Cruzados. J'aurais eu la
basse/batterie des Cruzados ça aurait été bien. Et là il me dit "Essaie-le
encore encore une fois !". Je lui répond "Oui mais on a plus que deux
jours de répétition et ensuite on va enregistrer. Qu'est-ce que tu vas
faire ?". Il me dit "Essaie encore une fois !". Le soir à l'hôtel je lui
dit "Écoute, c'est pas possible. Tu lui dit. Il va peut-être m'en
vouloir mais pour moi il est pas bon. Il ne swingue pas, il traîne !".
Donc il l'a viré. Et puis il m'a présenté un mec qui sortait d'un groupe
de hard que je ne connaissais pas. Blond avec les cheveux longs. Il
avait double grosse caisse. J'ai dit "Non, je ne veux pas de double
grosse caisse !". Mais il jouait bien. Donc en 2 jours il a appris tous
les morceaux et ensuite on a fait l'album qui est un bel album, bien
enregistré. J'avais tous mes morceaux à moi et on en a pris que 3 ou 4
car Il m'a filé tous ceux qu'il avait, lui, par un éditeur. Comme ça il a
touché du blé. Et je me suis laissé avoir car c'était des morceaux
inédits, "Never Anoher Kind of Battle" "House of fire" des beaux trucs et ça m'a énormément touché. Donc je me suis
dit "Bon, celles-là elles serviront pour l'album d'après". En fait il y
en a pas mal qui sont sur "Lost Territories". Et là j'ai dit "On ne
joue que mes morceaux. Il y a que le "Tango de la rue" qui était de Kenny Margolis aux claviers qui
me l'a apporté toute faite, qu'on a joué et qui a bien marché puisqu'on a
même fait le clip avec le dessin animé. Ça a bien marché pour moi.
C'était drôle. J'avais que des musiciens américains et c'est moi qui
avait le trac. Mais je me suis bien senti avec eux et ils sont devenus
des potes. Je reçois toujours des mails du bassiste qui viennent des
États-Unis et qui me donnent des nouvelles. Et donc on a fait ça. C'est
sorti, encore, chez Musidisc qui ne savait pas trop vendre mes disques. A
partir de là, toujours avec Herve Deplace qui travaillait chez Musidisc et qui
ensuite est parti chez EMI, il m'a dit "Si tu veux je te fais rentrer
chez EMI. Fais-moi des maquettes !". J"ai monté un groupe parce que les
américains sont venus, on a fait une tournée ensemble et j'avais pris
Gillou comme guitariste rythmique. Je lui ai dit "Tu connais les
morceaux. Tu diriges le groupe pendant que je m'occupe des spectateurs
!". C'était sympa, cool. On a fait une belle tournée avec la voix pétée.
J'avais pété ma voix car on avait pas répété avec les musiciens
américains. Ils sont arrivés 3 jours avant le premier concert au Volcan
du Havre. On a répété 3 jours, 8 heures d'affilée. J'avais plus de voix.
Donc je suis allé faire une piqure de cortisone pour que ça revienne un
peu mais j'avais la voix qui se cassait à chaque concert. Donc on a
fait le Havre. Le lendemain on était à Évreux. Là j'avais la voix qui se
cassait tous les deux morceaux. Et pourtant j'avais fait une autre
piqûre mais la cortisone ça fait gonfler, c'est tout. Après on a eu une
journée creuse puis on est allés jouer à Brest dans un pub de 300
places. C'était pas très grand. Sauf que moi quand j'ai plus de voix, je
ne dors pas tellement j'ai peur de ne pas avoir de voix pour le
prochain concert. Je suis arrivé là-bas, plus rien ! Et le surlendemain
on avait Paris à l'Élysée Montmartre et l'enregistrement Live du
concert. Je n'arrivais pas à dormir. Mimi m'a emmené chez un spécialiste
de la voix à Bastille. Il m'a dit "Il y a rien de cassé. Par contre
c'est très rouge et très irrité. Si vous continuez comme ça vous risquez
de vous péter les cordes vocales !". J'avais refusé toutes les
interviews à Paris. Je ne pouvais pas parler. Et là je lui dit que je ne
peux pas annuler la tournée et que j'avais déjà payé les musiciens
américains car je voulais qu'ils soient tranquilles. J'avais dit à Reynold
"Tu vas à la banque, tu te démerdes, tu prends le blé, tu les paies et
comme ça ils seront tranquilles. Et tu rembourseras la banque avec les
entrées des concerts. Ça avait plutôt bien marché. On avait fait 15
concerts en 17 jours avec moi sans voix.
J'ai commencé à prendre un truc que je respirais à fond avant de monter sur scène. Je prenais ça 10 minutes avant. C'était tout un système de machinerie. Je commençais à chanter dans les graves et après ça montait petit à petit, ça se réchauffait. Donc ça montait dans les médiums. Pas trop dans les aigus mais j'arrivais à chanter. J'ai annulé toutes les interviews que j'avais la veille car on a eu un jour entre les deux. Le docteur m'a dit "Le mieux que vous avez à faire c'est de rentrer chez vous !". Je lui ai répondu "je ne peux pas !". Donc on a fait les concerts avec la voix qui commençait dans les graves et petit à petit ça revenait. Tout le monde avait les jetons que je ne puisse pas chanter. A Brest, j'avais pas chanté. Alors j'écrivais sur un papier et je disais à Gillou "Dis-leur qu'ils aillent se faire rembourser parce que je peux pas chanter !". Et les mecs étaient devant moi avec des spliffs énormes qu'ils m'envoyaient dans la gueule et me disaient "Mais non Bob, vas-y !". Je leur répondais "Je peux pas !". Donc on a quand même fait le concert. Ils ont bien joué et tous ont fait les choeurs. C'était une épopée aussi, ça ! Finalement pour le disque Live on a retouché un peu les voix avec Jeff Eyrich qui était venu exprès. Et d'ailleurs pas très loin de chez toi, on avait fini le mix. Après j'ai pensé à "Lost Territories". Donc j'ai remonté un groupe. J'ai repris Bertrand car je le voulais déjà quand j'étais avec le pianiste. Je voulais un truc solide, un peu de basse. Ensuite Bertrand connaissait un batteur, donc c'était Denis Charolles et puis à la guitare j'avais Olivier qui était là déjà et qui avait fait la tournée de Steve Hunter en tant que roadie. Il avait 18-19 ans. Je lui avais dit "Fait le roadie, apprends !". Il avait bien appris. Après le Live on a fait une tournée pour le promouvoir. Donc il y avait toujours Tony Marsico à la basse et on avait le pianiste qui avait joué avec Johnny Rivers. Et puis il y avait un guitariste avec un béret Steve Kayton. Et ce coup là, j'avais fait jouer Olivier. On avait fait encore une belle tournée avec eux où j'avais pu chanter malgré tout. La voix a mis presque 3 ans à revenir. On a même fait les lycées en Seine-Saint-Denis. C'était une galère aussi avec les mecs qui voulaient du rap. Je leur disait "Eh, si vous voulez du rap vous sortez d'ici parce que moi j'en fais pas. Alors allez ailleurs et regardez les filles. Elles aiment bien ce que l'on fait !". Donc il y en avait qui restaient et d'autres qui se barraient. Et le prof qui me disait "Mais comment vous leur parlez !". Je lui ai répondu "Ils me font chier donc je leur dit, c'est tout !" organisé par Zebrock.
Et là j'ai monté le groupe avec Bertrand. Gillou était venu jouer de temps en temps aussi. Au départ, il y avait aussi Joel Drouin. Quand Joel Drouin n'était pas là, Gillou venait jouer avec sa guitare, puis Olivier et Denis Charolles. On a fait 15 concerts. On était bien payés. On s'en sortait. C'était difficile mais on s'en sortait. Et puis les américains, on ne pouvait pas les faire venir. Ça me coûtait trop cher en avions. Ils ne coûtaient pas plus chers que les français en salaire mais les avions, il fallait les payer. J'étais pas Johnny Hallyday pour faire venir les mecs comme ça. J'avais pas de blé. Donc j'ai refait un bon groupe avec Bertrand qui est toujours là aujourd'hui. Ça fait 31 ans. Gillou, ça fait maintenant 43 ans qu'il est là à part la coupure entre "Rendez vous In Angel City" et "Lost Territories". Mais il est revenu juste après faire quelques trucs en studio avec nous. Et donc pour "Lost Territories", j'avais écrit toutes les chansons. Elles étaient bien. On à rajouté le "Tango de la Rue" et puis j'ai dit "Je veux chanter mes chansons. Avec lui j'avais corrigé les textes au cas où et puis ça allait. Il a voulu un peu de blé parce qu'on avait corrigé les textes. Ça les américains pour la monnaie... Et puis "Lost Territories", c'est un très bel album. On avait fait venir, en plus un percussionniste indien Cherokee qui s'appelait Mike Tempo. Un mec super sympa. Il avait du sang indien. Je l'ai fait venir aussi pour la tournée en France. On a fait encore une tournée avec eux à laquelle s'est rajouté Bertrand, Denis Charolles et Olivier Durand. Par contre, chez EMI, j'avais un contrat par lequel je devais vendre 30.000 disques en 3 mois sinon on pouvait arrêter le contrat. Je suis arrivé à 27.000 en 3 mois. Le patron avait changé. Et là il me dit "Tu chantes en français sinon on arrête". Car il manquait 3000 disques que j'ai vendu après, évidemment. Donc, à partir de là, ça devenait difficile. J'avais fait des morceaux de "Blue Stories" que j'étais allé faire écouter chez Sony à un mec sympa qui travaillait avec Foulquier. Parce Foulquier, même si je chantais en anglais, il me faisait venir dans ses émissions. Et puis j'avais fait "Taratata" avec les Pow Wow et avec Bertrand, Olivier et Denis. On avait fait un truc en français de Zachary Richard "Travailler c'est trop dur". Il y avait moi, le mec des "Starshooter" qui chantait un couplet, Patrick Verbeke et puis eux. C'était des potes les Pow Wow.
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Au cours de toutes ces années de route, concerts, studio, radio... tu
as rencontré énormement de gens, y a t il de belles rencontres qui t'ont
marqué ? Lesquelles et pourquoi ?
J'avais
rencontré Southside Johnny. On avait fait quelques trucs et on avait
chanté ensemble. J'avais fait une tournée en Angleterre avec Willy
DeVille. J'aimais beaucoup Mink DeVille même plus que Willy DeVille.
Mais bon, c'était bien aussi. La preuve, c'est qu'il avait tourné sous
le nom de Willy DeVille après. Il y avait même Kenny Margolis qui rejouait avec
lui. Durant toute la tournée qui avait lieu en Europe, il avait demandé
au Tour manager qui était un mec du Plan "Mais quand est-ce qu'il va
venir Bob ?". Et il lui avait répondu "Mais il ne va pas venir au
Luxembourg ou à Bruxelles ou à Berlin. On va aller en Normandie et s'il
est libre il sera là. Donc il a joué à Deauville et on y est allé. On a
vu le concert et je suis allé le voir après car il était à l'hôtel "Le
Normandy". Il était en train de boire un verre avec des amis et sa
nouvelle femme. Il voulait me parler, car je connaissais sa femme, la
deuxième, me raconter comment ça s'était passé. Mais je ne vais pas
rentrer dans le détail car c'est trop horrible. C'est a dire que lui
avait arrêté la dope mais sa femme n'avait pas réussi. Et un jour il est
rentré en bagnole, ils étaient en Arizona à l'époque, il est rentré
chez lui et il l'a trouvé morte. Elle s'était suicidée car elle n'avait
pas supporté de ne pas arrêter la dope, l'héroïne qu'elle avait commencé
avec lui d'ailleurs. Et lorsque je l'ai vu à Deauville, il était avec
une autre fille. Il buvait du Coca et fumait des clopes. Il m'a dit "Je
ne peux pas arrêter tout, donc je fume des clopes !". Ça m'avait étonné
qu'il me raconte ça. Donc on s'était isolés et il m'avait raconté.
C'était assez dur. Et puis, il y est passé 6 mois après car il était
malade et empoisonné par tout ce qu'il avait consommé dans sa vie. C'est
dommage. C'était un sacré musicien et un sacré chanteur. Et puis les
autres. J'avais entrevu le chanteur des Small Faces, Steve Marriott. Je
l'avais vu au Gibus. Il était venu avec Packet of Three. Il avait le nouveau batteur
des Stones, le black, Steve Jordan qui jouait avec lui et un bassiste. Personne ne
le connaissait comme ça. Il n'y avait pas grand monde. Et nous, un soir,
on y va pour manger une Pizza comme on faisait des fois au Gibus très
tard. J'arrive et je le vois là. Je suis allé lui dire bonjour. Il m'a
pris dans ses bras et m'a dit "Merci d'avoir enregistré "All or Nothing"
car j'ai touché des droits d'auteur !". C'était super. Et puis j'ai
appris ce qu'il lui était arrivé après.
Puis l'enregistrement de
"Lost Territories", un grand tournant également, raconte nous la
création et l'enregistrement de cet album ?
Pour
"Lost Territories", l'expérience que j'avais eu avec le pianiste était
terminée. Ça m'avait ouvert des voies mélodiques un peu plus
importantes. Et puis le fait d'aller aux États-Unis, le coup d'avant, où
il n'y avait que de bons musiciens aussi. Mais là, j'ai voulu y aller,
cette fois, avec mon groupe. EMI a payé tous les frais et ça leur a
coûté un max de blé parce que je suis resté 2 mois aux États-Unis avec
Mimie. Les gars, eux, sont restés 3 semaines, c'est à dire 2 semaines de
répétitions et la 3e et demie où l'on a enregistré après. Les Choeurs,
c'était deux chanteurs qui jouaient dans les clubs et qui chantaient
vachement bien ensemble. Quelques guitares en plus par-ci, par-là et Kenny Margolis
aux claviers alors qu'il y avait le pianiste qui était venu de Los
Angeles aussi et qui avait fait la tournée après le Live où il y avait
justement Kenny Margolis dessus. Et lui dans sa tête il allait jouer avec moi toute
sa vie. Il arrive et il voit Kenny Margolis. D'ailleurs, c'est lui qui m'a offert
le tapis indien que tu vois sur la porte de mes toilettes. Il voulait
rester. Et en fait il l'a offert à Mimie et puis s'est barré. C'est
dommage. Et donc pour "Lost Territories", j'ai eu cette implication. Le
fait d'avoir joué avec Joel Drouin, cette manière de chanter, aussi, car il y
avait de belles ballades et Bertrand qui est un sacré contrebassiste m'a
fait du bon boulot. Olivier était un bon guitariste. Moi, j'ai écrit
presque tout. Olivier m'a donné un coup de main pour les accords. En
plus il y avait le "Tango de la rue" qui était écrit par Kenny Margolis. Il m'a
emmené sur place en studio. Il était à New York mais il est venu à Los
Angeles. Et puis j'avais un bassiste. J'ai repris JJ Holiday le guitariste et
on a pris le percussionniste. Puis on a répété avec le groupe
franco-américain, donc ensemble pendant deux semaines. Deux fois cinq
jours car ils voulaient se reposer le week-end. Les musiciens étaient
payés donc j'étais content. Puis, hôtel sur Hollywood Boulevard et on
avait toujours les week week-ends de libre. On allait faire la fête. Les
restos mexicains pour la Margarita ou de la bonne Tequila. C'était
sympa on passait du temps ensemble. On réfléchissait à ce qu'on avait
fait. C'était vraiment bien. C'est comme ça que le groupe s'est cimenté
un peu plus. Et quand on est rentré en France on a continué a jouer.
Parmi les américains JJ Holiday est venu plusieurs fois Kenny Margolis aussi. Et après on
a rencontré Nicolas Noel, Bertrand qui le connaissait m'a dit "Tu sais Nicolas Noel Il
joue bien. Tu le prépares, on le fait jouer avec nous et il va se mettre
dans le bon chemin !". Et du coup j'étais pas obligé de faire revenir Kenny à chaque fois qu'on avait des concerts car il fallait que je paye
l'avion. JJ Holiday était venu et était resté 3 mois après la tournée en
France. Et on a tourné comme ça. Il y avait pas de 2e guitare donc j'ai
rappelé Gillou. Je lui ai dit "Gillou, tu reviens jouer avec moi !". Il
m'a répondu "Mais moi je ne te ferais pas les solos à Olivier!" et je
lui ai dit "J'en ai pas besoin, tu me fait des riffs. Je ne veux plus
des solos comme ça. Il devient bavard !". Alors il est venu. Il était
tellement content. Sa mère m'avait dit "Bob, t'as sauvé la vie à mon Gillou". Et puis aujourd'hui il est toujours là et on avance, on
continue. "Blue Stories" on l'a fait après avoir cherché des boîtes de
prod et j'ai rencontré un mec du label Griffe qui m'a dit "Moi je te distribue
l'album chez Sony. Tu le fait et je te le distribue". Warner Chappell
m'avait avancé du blé pour payer le studio à Paris, le studio Davout qui
était quand même assez cher. Et Davout m'avait fait le prix à 50% en
échange de quelques points sur les ventes. J'avais fait venir Kenny Margolis pour
produire un peu et pour jouer en même temps. J'avais fait venir aussi
JJ Holiday pour qu'il me fasse de la slide. Donc c'était presque la suite
logique de "Lost Territories" mais il est beaucoup moins connu par les
gens parce qu'il est sorti en 1998, donc 5 ans après "Lost Territories"
et ils ont un peu oublié. Le mec chez Griffe n'avait pas fait de pub. Je
lui ai dit "C'est pas la peine que tu me distribue chez Sony s'il n'y a
pas de promo pour la vente !". Et il me répond "Non on fait pas de
promo. C'est tous des cons !". Le con ça été moi. On en a vendu 6000
exemplaires... Donc j'étais content de le rééditer parce que c'est un
bel album avec plein de bons morceaux et avec presque la même équipe que
pour "Lost Territories". Et le studio Davout était un bon studio. Il y
avait quand même JJ Holiday, Kenny Margolis et mon groupe. Il ne manquait que le
percussionniste et le talent de Jeff Eyrich qui m'a fait choisir la manière de
faire ci ou ça. Kenny Margolis, lui, voulait que je gueule et ça m'avait cassé un
peu la voix sur l'album d'ailleurs. Voilà. Et après j'ai décidé de
trouver un distributeur. Donc ça été Dixiefrog qui distribuait surtout
des disques de blues et j'ai produit mes albums moi moi-même avec
l'argent qui me tombait de la Sacem, des droits d'auteur. Mimie le
mettait de côté et disait "On dépense pas. On part pas en vacances !".
On mettait le blé de côté et
au bout de 2 ans quand j'avais assez d'argent elle m'a dit "Si tu veux
faire un disque, tu as 14.000 euros !". Et c'est comme ça que j'ai fait
"Libero" qui est un très bel album. Et ensuite tous les autres jusqu'à
ce que j'aille chez Verycords avec l'avant-dernier "New Day Coming".
Après il y a eu le Covid. Dixiefrog était distribué par Harmonia Mundi
qui ne savait pas me distribuer car, eux, c'était le jazz, le folk, la
musique du monde mais pas le rock'n'roll. J'ai récupéré tous les vinyles
de l'époque que l'on avait fait sur "Howling". Maintenant je les ai et on les
vend un peu moins chers à tous ceux qui veulent acheter mes disques. De
toute façon les gens les copient maintenant. Ils faut qu'ils sachent
que tout ce qu'ils copient, nous on ne gagne rien, tout juste quelques
centimes. Ils payent 10€ par mois pour copier tout ce qu'ils veulent et
nous on touche que dalle. Moi, principalement, comme je ne suis pas un
gros vendeur avec internet je ne touche pas grand-chose. Moi internet me
fait chier à part Facebook parce que j'ai quand même les fans qui
écrivent et ça fait plaisir de lire leurs mails. Et, comme ça, je peux
leur annoncer les concerts, les sorties d'albums. J'ai l'impression que
l'on est à la fin d'un cycle. Ça se termine. Moi-même je suis à la fin
de mon cycle. Après voilà je ne sais pas jusqu'à quand je vais durer.
Tant que je peux, je continue à chanter. J'ai toujours la voix, j'ai
toujours envie. Parce que le seul truc que j'ai dans ma vie et qui me
sauve c'est, déjà, quand je vais répéter avec le groupe et puis quand on
part sur la route. Ça, c'est une bénédiction pour moi quand je viens
vous rencontrer, vous tous !
En 2011, tu joues
dans le film "Le Havre" d'Aki Kaurismäki, et tu participes au Festival
de Cannes, raconte nous cette aventure cinématographique ?
Là,
c'était sérieux parce qu'en fait son premier assistant était français
et il l'avait amené ici et lui avait dit "T'aimes le rock'n'roll, il y a
Little Bob !". Moi j'avais été en Finlande en 1978, il était étudiant à
l'époque, t'imagines ! Il ne m'avait pas vu mais il avait appris que
j'étais venu et il a demandé à me voir. Donc il est arrivé là. Il a
ouvert la porte du jardin et il est arrivé au bord de la terrasse. Je
lui ai dit "Hi ! I'm Little Bob" et il m'a répondu "We gonna do Cannes
man !". Il savait déjà, pour lui, qu'on allait à Cannes. Donc au départ
il voulait juste faire une chanson, c'est tout. Et quand on s'est
rencontrés, il y avait Mimie et moi. Il a vu que nous étions un couple
avec une histoire donc il nous a rajouté à son histoire. Il avait écrit
le scénario et sa fille, qui était traductrice finlandaise avait écrit
les dialogues qui étaient nuls. Quand je les ai lus, je me suis dit "Je
peux pas dire ça, c'est trop con !". Donc, il nous a filmé dans le bar
qui est sur le quai. Comme Mimie et moi, on était séparés, il a filmé
Mimie chez un fleuriste. Puis il est venu me voir car André Wilms l'acteur qui a
joué dans tous ses films était décédé. Ils avaient besoin d'argent pour
payer le voyage de rapatriement chez sa mère à Londres. Donc la fille
qui jouait avec eux dans le film et qui était barman lui a dit "C'est
simple, t'appelles Little Bob et tu lui fait faire un concert de soutien
!". Il lui a répondu "Est-ce qu'il va être d'accord ?". Et un mec lui
dit "Oh non, sa femme est partie. Il va faire la gueule et il ne va pas
accepter". Ils sont allés filmer Mimie chez un fleuriste et elle a dit
"Il faut qu'il me demande pardon et je reviens !". Et puis cette
histoire à la con. Il avait trouvé une histoire de plantage de pommier
ou de rosiers. N'importe quoi. Comme si un couple pouvait se séparer
avec un truc comme ça. Après, donc, il me filme chez Jaquote sur le quai.
J'avais des verres vides devant moi. Lui, il picolait comme un trou mais
moi non. A un moment j'ai dit "File-moi un petit whisky, que j'ai une
fois pour moi le verre plein". Et il me dit "Non, reste comme ça, tu es
très bien comme ça !". Et donc André Wilms arrive, filme ça et me dit "Voilà,
est-ce que vous accepteriez de jouer, sous contrat, pour le voyage de ce
môme ?". J'ai répondu "Ben non, Mimie n'est plus là". Et il enchaîne
"Et si elle revient !?". Je lui dit " Si elle revient, je suis prêt,
même, à faire une connerie, à faire rigoler les gens". Mimie était à
l'extérieur du bar. Il ouvre la porte et Mimie arrive. Elle s'est
dirigée vers moi avec son regard plein d'amour. Et il avait dit "Vous ne
vous embrassez pas. Vous vous regardez. C'est important le regard".
J'ai dit "Oh Mimie", elle a répondu "Oh Roberto". C'était tellement
gentil, tellement beau. Et l'image est dans le film. Puis il nous a fait
enregistrer la chanson pour faire un playback. On l'a joué un peu plus
rapide que sur l'album "Libero". Il a choisi "Libero" parce que c'est
une histoire d'immigrés et qu'il est très touché par ça. Et donc après
il me dit "Le film est choisi pour Cannes, tu vas venir jouer pour moi à
Cannes". Et on a joué dans une salle sur la plage. D'abord on a été
voir le film. On a fait la présentation de tous les artistes et au
moment où je me retrouve face aux photographes je leur fait un doigt
d'honneur. Toujours le même Little Bob ! Il y a eu, d'ailleurs, des
photos de moi dans la presse avec mon doigt d'honneur. Et le soir où ils
projettent le film, on était en bas de l'escalier rouge. Au moment où
l'on s'apprête à monter, ils envoient la chanson "Libero". Moi je
voulais monter avec le groupe. Et là Il me dit "Non, laisse monter le
groupe en premier". Ils ont été filmés tous les quatre, Nico, Gillou,
Bertrand et Nicolas, tous en smoking. Ils sont montés. J'étais avec eux
et il m'a dit "Non, toi tu mets ton blouson rouge et tu montes avec
moi". Donc avec lui, André Wilms, la fille qui avait joué le rôle et puis Mimie.
Et au moment où on monte ils mettent "Libero". J'ai regardé en l'air et
j'ai dit "Tu vois papa t'es là avec nous". Et on est montés. Je me suis assis juste derrière lui avec Mimie, lui et sa femme. Applaudissements évidemment et accueil du public extraordinaires. Il n'a pas reçu la palme mais à obtenu le prix de la presse. Il aurait mérité autre chose parce qu'en face de lui, il y avait "The Artist", le film avec Jean Dujardin. Mais bon, le sujet c'était les immigrés et peut-être qu'ils n'ont pas voulu mettre ça en avant. Donc il n'a pas eu le prix. Et puis nous, le lendemain, on est partis jouer en Corse. On a pris le ferry de Nice et on a joué là-bas puis on est rentrés après.
C'était un mec de gauche, un mec droit, qui n'avait aucune attache avec le show-biz. Mais alors qu'est-ce qu'il picolait. Moi j'avais demandé un petit scotch pendant que j'étais là à faire le con. Il m'avait dit "Non" alors que lui, c'était bière et scotch. Il était rond comme une queue de pelle. On a dîné à 20h et on a enregistré à 22h. Puis on est parti se coucher à 4h du matin. Parce que lui, ce n'est pas la chanson qu'il voulait nous faire répéter puisqu'elle avait été enregistrée au début. Mais au niveau des images, il changeait tout le temps. Il avait une équipe franco-finlandaise. Tous les gens qui enregistraient étaient finlandais. L'ingénieur du son, les caméramans, les assistants et mon pote Gilles Charmant qui était son premier assistant. C'était lui qui était fan de moi, qui habitait en Angleterre au moment du tournage et qui lui avait parlé de Little Bob. C'est parti de là. Puis on devait aller en Finlande tourner avec le film mais, en même temps, il y a l'Allemagne qui est tombée. On devait faire 8 concerts, jouer tous les jours, bien payés, camion et hôtels 3 étoiles. Donc on a fait cette tournée et on a pas pu aller en Finlande. Depuis, il a tourné un autre film sur les immigrés Syriens. Un chouette film, aussi qui se passe à Helsinki. Et finalement on a pas pu retourner jouer en Finlande.
En 2012, Little Bob devient "Little Bob Blues Bastards" pourquoi ce changement de nom ?
Parce
que j"ai toujours aimé le blues et, en même temps, le rock'n'roll.
Donc, en fait, "Blues Bastards" c'est parce qu'on a mis un peu plus de
blues dans le répertoire mais on l'a batardisé avec le rock'n'roll donc
voilà pourquoi "Blues Bastards". On est allés en Angleterre en 2019. On a
refait une petite tournée et ils ont sorti l'album "New Day Coming". En
échange on a fait 3 concerts à Londres. D'ailleurs j'ai été déçu car
Londres à changé complètement. Avant, c'était un endroit où il y avait
plein de salles où l'on pouvait jouer. Maintenant ce ne sont que des
bureaux. C'est internet qui a pris la place. C'est chiant. C'est plus le
vrai Londres que je connaissais. On a, malgré tout, fait 3 bons
concerts. Les gens étaient là, ils étaient contents. Il y en a qui
étaient revenus au bout de 40 ans, t'imagines ! On y était pas retournés
depuis 82. Ça fait longtemps, donc on t'oublie. Mais il y avait
quelques fans. D'ailleurs le mec qui avait sorti l'album était un fan.
Mimie n'était déjà plus là. Et le fait d'aller jouer à Londres, ça
m'avait filé la pêche. Au retour, j'ai écris 4 morceaux d'affilée pour
"New Day Coming". Ça veut dire que j'aimerais bien y retourner. Mais il
faut qu'on paye tout. Le voyage le camion, les hôtels, la bouffe. Mais
bon, on est pas les Stones. On est pas un groupe bourré de pognon. On
s'en sort.. Déjà dans cette histoire, j'ai perdu 3000€ que je n'ai pas
pu me faire rembourser. Donc c'est pas possible. Il y a des gens qui
voulaient qu'on revienne. On leur a dit "Oui, mais trouvez-nous des
concerts qui nous payent un minimum. On ne demande pas à être riches
mais au moins que tous les frais soient payés". Après il y a eu le
Covid. On a fait 2 concerts en mode confinement et on a commencé à
enregistrer le dernier album "We Need Hope" début 2020 puis on l'a
terminé, lorsqu'il y a eu un break avec le Covid, au mois de juin. On a
refait quelques guitares, les chœurs et j'ai refait une voix ou deux.
Maintenant il faut faire revenir les gens aux concerts car je constate
que c'est plus difficile. Ils sont habitués à jouer aux jeux vidéo, à
regarder les conneries qui passent à la télévision. Et nous on est là,
vivants, et on joue avec notre cœur pour vous donner une autre musique.
C'est pour ça qu'on a besoin de vous comme vous avez besoin de nous. Ça
vous fera du bien si vous venez.
Avec tes Blues Bastards tu joues à l'Hôtel Matignon le 21 juin 2017,
convié par le Ministère de la Culture. Quels souvenirs gardes tu de tout
ca ?
D'abord,
on aurait pas joué à L'Élysée pour Macron. Les gens de Matignon en
avaient ras le bol du flonflon, accordéon et chansonnette. Ils voulaient
un groupe de rock. En plus, il y avait notre maire du Havre, Edouard
Philippe qui avait été élu premier ministre. Ils lui ont parlé et il
leur à dit de prendre un agent. Il ne voulait pas rentrer là dedans. Et
donc, ils ont contacté un agent qui travaillait avec eux et qui leur
fournissait des trucs. Et là quelqu'un m'appelle et me dit "Allô, c'est
Easy Rider. On voudrait vous faire jouer à Matignon. Est-ce que vous
êtes d'accord ?". Je me suis dit "il y a une connerie là. Easy Rider et
Matignon ça va pas ensemble !". C'était la fête de la musique quand
même. C'était pas pour n'importe quoi. Et là j'ai dit "Pourquoi pas !".
Je ne jouerais pas pour le Front National mais Matignon je veux bien.
Après tout c'est la fête de la musique, c'est ouvert à tout le monde.
Donc on s'est bien fait payer, on les a fait raquer. Après, il y a
quelques crétins qui nous ont critiqués sur Facebook. Mais on a été très
bien reçus, bien traités sauf les soldats qui nous ont fouillés comme
si on était des bandits. Ils nous ont fait ouvrir les étuis de guitares,
ils ont regardé dans les amplis s'il n'y avait pas une bombe. En plus,
je me rappelle très bien qu'on avait fait les balances vers midi et on
devait jouer en dernier après tout le monde. Il y avait au moins 4 ou 5
numéros avant sous le soleil. Nous on a joué à l'ombre. Et donc pendant
qu'on faisait la balance le premier ministre, Edouard Philippe, est
arrivé suivi par des caméras parce qu'il y avait un changement
ministériel. Il est arrivé devant la scène et m'a fait signe. Je lui ai
dit "Bonjour monsieur le maire !". Pour moi c'était toujours le maire du
Havre. Donc on a fait ça pour se marrer, c'est tout. On ne se foutait
pas de sa gueule. Et puis je sais qu'il a écouté le concert pendant
qu'il parlait, la fenêtre ouverte.
Y a-t-il un artiste ou un groupe avec lequel tu rêverais de jouer ?
J'aimerais
faire un bœuf avec Springsteen même s'il à vieilli maintenant. Mais
bon, il a toujours le truc. Je l'ai vu jouer avec un autre mec avec
lequel j'aurais aimé chanter aussi, c'est John Mellencamp. Il a pris un
coup de vieux, lui ! Il a la voix très rauque. On dirait presque Tom
Waits. Après en France, comme je chante en anglais, ça rend les choses
plus difficiles par rapport aux artistes français. Chrissie Hynde des Pretenders mais elle est trop grande. J'en ai eu une d'1m74 avant Mimie.
Mimie faisait ma taille, c'était idéal ! Et puis qui d'autre !? Clash !
J'aurais bien fait le bœuf avec eux car je sais que le chanteur était
un rocker et puis leur bassiste venait nous voir tout le temps quand on a
joué au Nashville à Kensington. Voilà, c'est à peu près tout.
Si tu devais te définir, quelle serait ta phrase ou devise ?
Si
je devais me définir ? Je suis, malgré tout, fier d'avoir résisté au
fait de continuer à chanter en anglais même si ça m'a ôté une grande
partie du public. Pour preuve, les 500.000 albums de Trust, les millions
d'albums de Téléphone y compris les Insus. Mais à vrai dire, je m'en
fous. Les gens qui écoutent ça n'ont pas envie d'écouter Little Bob.
Ceux qui aiment la musique m'écoutent. Ceux qui aiment le rock'n'roll,
mon rock'n'roll. Parce qu'on Peut
aimer la musique et aimer autre chose. Voilà. Après je suis content
lorsque j’entend un groupe qui fait du rock'n'roll et qui recommence à
jouer comme les Fuzzy VOX où
comme au Havre, il y a les "Francois 1er". Comme tous les mecs
s'appellent François c'est pour ça. Car François 1er c'est lui qui à
fait le Havre. Et d'après les 500 gens du Havre ils se sont appelés
comme ça. C'est Frandol le mec des Roadrunners avec Francois Lebas Qui jouait dans Fixed up et Asphalt Tuaregs
puis les deux autres mecs. Il y a aussi Laurie qui s'occupe de notre
Facebook et qui joue de la batterie. Et puis il y a les City Kids qui auraient
composés des nouveaux morceaux et qui sont en train d'enregistrer en ce
moment. C'est bien. Il y en avait d'autres. Il y avait les Scamps, les Asphalt Tuaregs que j'aimais bien. Moi, dès le départ, j'ai voulu aller ailleurs donc
ça m'a sauvé. C'est compliqué car plus tu vieillis plus tu deviens
difficile. Souvent les gens que tu aimerais rencontrer comme par exemple
cette chanteuse black dont le nom m'échappe, ce couple d'américains qui
vit en France. On a fait un concert ensemble et ils ont joué avant
nous. Et puis je les ai revus une autre fois avec un groupe du Havre qui
jouait avec elle à Caen. Pour moi la voix c'était entre Little Richard
et Tina Turner.... J'aime ces voix la... Je suis un rocker qui aime le blues mais
le blues du delta. J'aime bien le blues de Chicago mais c'est trop bien
joué, trop propre. Je préfère tous les bluesman, les premiers. J'aime
ce blues un peu crade, ça sonne vrai. Alors, oui, il y a des groupes de
blues en France qui jouent bien mais c'est pas mon truc. Le vrai blues
c'est celui des origines.
Question bonus, veux tu nous dire quelques chose, un message à faire passer ?
Tu
vois, j'ai rien contre le rap, par exemple. Mais ce que je n'aime pas
c'est que ce sont des machines qui les accompagnent. Moi, je préférerais
toujours la musique jouée par des musiciens. Donc ça c'est hyper
important. J'essaie d'avoir des bons musiciens qui jouent avec moi. On
est ensemble, c'est fidèle, on est un bon groupe ensemble. Les machines
ont pris un peu trop de place dans la musique. Même les rappeurs
pourraient se faire accompagner par un guitariste, un bassiste, un
batteur ne serait-ce que ça. Un clavier pour avoir des sons autres et
ils pourraient rajouter des bases rythmiques avec des machines mais
qu'il y ait au moins des musiciens pour jouer avec. Moi, ce que je veux
c'est de la musique jouée par des êtres humains car ils ont leur blues à
eux. Ils mettent leur âme dans ce qu'ils font et ça se sent. Et puis,
écouter de la musique c'est très important car ça fait du bien.
N'importe quelle musique. Les mômes écoutent du rap. Tant mieux pour le
rap mais écoutez aussi le reste autour. La musique classique, la
variété, aussi, bien que ce qui me déplaît c'est que c'est trop
commercial et juste bon à faire du blé. Mais surtout de la musique jouée
par des musiciens. Ça c'est bon.
On ne peut pas terminer cette interview sans évoquer Mimie...
Mimie
c'est 32 ans de vie commune et d'amour. Elle m'a cherché et elle m'a
trouvé. Et depuis ce fameux concert à Issy-les-Moulineaux avec le
pianiste où elle était là par hasard pour accompagner une amie à elle.
Elle devait aller faire du yoga mais elle est restée et m'a écouté. Et
au bout d'une heure elle a tapé sur le bras de sa copine et lui a dit
"C'est lui que je veux !". Moi je ne le savais pas encore à l'époque.
Mimie ça été la compagne de ma vie, le cadeau de ma vie. Maintenant je
suis heureux même si j'ai le blues parce qu'elle n'est plus avec moi.
Mais je suis heureux de l'avoir eu 30 ans auprès de moi. On était comme
les deux doigts de la main car elle a même tourné avec moi. Elle faisait
tour manager. Elle conduisait le mini bus et elle était incroyable.
Elle a travaillé avec moi tout le temps. Et après ce truc est arrivé,
cette saloperie. Elle s'est battue pendant 7 ans et demie avant d'y
passer. Elle a peut-être tout fait à l'envers et moi je l'ai pas poussée
non plus. Je voulais qu'elle soit heureuse et qu'elle puisse faire ce
qu'elle voulait. J'ai peut-être eu tort et j'aurais dû lui imposer la
chimio tout de suite. Voilà, Mimie c'est mon coeur, c'est ma vie et
j'espère que je vais la retrouver un jour. Je sais pas comment. Dans une
autre vie peut-être si ça existe... Dans mes rêves... Viens chérie...
Un grand merci a Little Bob de nous avoir accordé cette interview si profonde et si touchante
Un grand merci pour sa sincérité son honnêteté sa gentillesse son cœur immense
et plus personnellement pour son amitié sincère depuis un si grand nombre d'années.
Retrouvez la partie 1 ICI
LITTLE BOB // Interview // Du Havre à la Légende - été 2022. (Partie 1)